mercredi 12 novembre 2014

CAN-2015 - Fatalistes, les Marocains jouent collectif avec leurs dirigeants

"On ne va pas mettre la nation en péril pour faire plaisir à la CAF": au lendemain de la décision de la Confédération africaine de football de retirer l'organisation de la CAN-2015 au royaume, des Marocains se disaient mercredi solidaires de leurs dirigeants.

A près de deux mois du coup d'envoi, la CAF a retiré mardi l'organisation de la plus importante épreuve sportive du continent au Maroc, qui sollicitait coûte que coûte son report en raison de l'épidémie d'Ebola. L'instance suprême du foot africain a également disqualifié la sélection, qui devait participer au titre du pays hôte.
D'autres sanctions pourraient suivre, a encore prévenu la CAF, des menaces qui étaient toutefois accueillies avec fatalisme mercredi dans les rues de la capitale, Rabat.
"On est prêt à assumer les sanctions. La santé des citoyens marocains passe avant tout", affirme Mohammed Isli, un fonctionnaire d'une cinquantaine d'années, attablé à la terrasse d'un café, un journal à la main.
"Cette demande était tout à fait justifiée. Il n'existe aucun vaccin contre cette maladie. La compétition sportive passe, mais les conséquences sanitaires restent", abonde Mohamed Amtague, un réparateur de 28 ans.
"Pour nous, les sanctions étaient prévisibles. On les respecte et on est prêt à assumer", confirme-t-il.

- Sécurité et tourisme - Tout au long de son bras de fer avec la CAF, le royaume a plaidé le "cas de force majeure sanitaire". "La santé du peuple passe avant tout" et le Maroc a "très bien fait", a lui-même jugé mercredi le sélectionneur-adjoint de la sélection marocaine de football, Mustapha Hadji.
Rare pays à avoir maintenu l'intégralité de ses liaisons aériennes avec les principaux pays touchés par Ebola (Guinée, Liberia, Sierra Leone), Rabat a toutefois paru prendre de court les dirigeants du foot africain le 10 octobre, au moment de formuler publiquement sa demande initiale de report.
De quoi expliquer l'intransigeance de la CAF? "Notre pays manque cruellement de poids dans une instance comme celle-là", croit plutôt Mohamed Amtague.
"Il y a sûrement des lobbies qui ont poussé la CAF à cette décision", acquiesce Hamid Chaabi, un enseignant, tout en dévorant des yeux les unes des journaux, sur une des principales artères de la ville.
Pour lui aussi, "la proposition du Maroc était raisonnable, compte tenu de l'épidémie d'Ebola", qui a fait près de 5.000 morts.
Dans la conversation, ce quinquagénaire avance toutefois d'autres explications à la position marocaine.
"La situation sécuritaire est délicate actuellement avec la menace Daesh (acronyme de l'Etat islamique en arabe, ndlr)", fait-il valoir, en allusion au flux de voyageurs et aux rassemblements de masse qu'aurait pu entraîner la tenue de l'épreuve.
Dans un pays où le tourisme pèse 10% du PIB, "tout cela aurait aussi pu influer négativement sur le tourisme international", renchérit-il.
"Si les gens entendent que le virus Ebola se répand au Maroc, on perd plus qu'avec cette annulation", remarque-t-il, en concluant: "On ne doit pas mettre la nation en péril pour faire plaisir à la CAF."

- 'Peuple frère' - Le 19 novembre, comme il l'a déjà fait, le Maroc doit accueillir un match de qualifications pour la CAN-2015 de la Guinée, dont les rencontres à domicile ont été délocalisées du fait d'Ebola.
Le royaume doit-il là-aussi dire non? Pas pour Hamid Chaabi, qui y voit une "exception" en faveur d'un "peuple frère".
Plus largement, pour éviter toute mauvaise interprétation de sa décision sur la CAN, "le Maroc doit présenter ses arguments aux Africains, et les Africains doivent accepter les arguments clairs et logiques du Maroc", souligne-t-il.
Supporteur inconditionnel des Lions de l'Atlas, le nom de la sélection marocaine, Mohamed Amtague revient lui à des considérations sportives.
"Notre sélection joue demain (jeudi) en amical contre le Bénin et j'espère que tous les Marocains la regarderont, même s'il n'y a plus cet objectif" de la CAN, clame-t-il.
Alors que le Maroc a multiplié les déconvenues lors des dernières compétions internationales, le jeune homme se montre même philosophe.
"On a plusieurs années devant nous maintenant, et on va tâcher de préparer une bonne équipe pour demain, ou après-demain."

(AFP)

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Journaliste spécialisé dans l'actualité sportive, j'ai collaboré, entre autres, à So Foot, Libération, Radio France Internationale. Aujourd'hui, je suis particulièrement les politiques sportives au plan national et dans les collectivités locales pour Localtis.