En passant 16 joueuses de rugby à VII sous contrat
semi-professionnel, la Fédération française espère donner à ses Bleues
les moyens de leur ambition olympique, mais les difficultés
d'organisation restent nombreuses pour des joueuses qui doivent tout
concilier.
David Courteix, l'entraîneur de l'équipe de France
dames de rugby à VII, était contrarié en ce gris mardi de novembre: ses
filles venaient d'effectuer "l'entraînement le plus moyen depuis le
début de la saison, et de loin", à quelques jours de s'envoler pour le
tournoi de Dubaï, qui débute ce jeudi et marque le premier rendez-vous
de cette année de qualification pour les JO de Rio-2016.
Mais
l'objet profond de son tracas est autre: voir le temps et l'énergie de
ses joueuses écartelés entre leurs études ou emplois et les
entraînements.
Pourtant, depuis septembre, la FFR a entamé une
petite révolution en créant le "Centre d'entraînement féminin de rugby à
VII" au sein duquel 16 joueuses bénéficient d'un contrat
semi-professionnel.
"Ça me paraissait incontournable pour espérer
suivre l'évolution actuelle du rugby féminin, assure David Courteix. La
quasi-totalité des équipes qui courent après une qualification olympique
sont complètement professionnelles. Et c'est parfois étonnant: le
Brésil et les Pays Bas sont pro, les Etats-Unis, le Canada aussi."
Le
Centre nourrit donc l'équipe de France: sur les 12 joueuses parties
pour Dubaï, 10 en sont issues. L'idée est d'exploiter au maximum le
potentiel du "réservoir de très bonnes joueuses", dixit Courteix, en
leur offrant d'abord une vraie préparation physique.
"Parfois, sur
le plan athlétique, il y a eu des équipes bien moins bonnes que nous au
rugby qui nous mettaient en difficulté", souligne ainsi l'entraîneur.
- Risque d'éparpillement -
Concrètement, l'année a été divisée en trois périodes: une dédiée
à la compétition, "où elles sont à 100% avec la Fédération" ; une dite
de "préparation physique en autonomie", où les joueuses "s'entraînent
seules en suivant un programme établi à l'avance" ; et des périodes "à
mi-temps", "les plus épineuses" car il faut "mixer les emplois du temps
des unes et des autres", soupire David Courteix.
Un casse-tête car
certaines des joueuses sont étudiantes, à distance ou sur le banc des
amphithéâtres, quand d'autres ont une activité, mais sur des rythmes
variables: l'une est infirmière intérimaire, l'autre pompier ou encore
ingénieur cryptologue au CNRS !
"Pour être sûr d'avoir tout le monde, il faut donc s'entraîner le soir", résume David Courteix.
Au
quotidien, cela donne "des emplois du temps très chargés mais on le
fait car on connaît l'objectif au bout", explique la talonneur Camille
Grassineau, également ailier à XV durant le dernier Mondial.
Elle est étudiante à Bordeaux et prépare un brevet d'éducateur sportif. Ce contrat l'a donc poussée à changer de ville pour s'installer plus près de Marcoussis (Essonne) où se trouve le centre, en suivant ses cours à distance, plutôt le matin.
"Désormais,
je passe le plus clair de mon temps à penser rugby et au VII en
particulier", détaille cette "hyper-active" qui évolue aussi à XV au
Stade Bordelais, où elle s'occupe certains mercredis et samedis
d'encadrement à l'école de rugby.
Forcément, cela demande un sens
pointu de l'organisation. "On pourrait les aider davantage dans
l'apprentissage de leur autonomie au quotidien, dans la gestion de leur
temps", souffle ainsi David Courteix.
Car la question est là: en
poursuivant un objectif scolaire ou professionnel d'un côté et sportif
de l'autre, les joueuses ne risquent-elles pas de s'éparpiller au risque
de ne réussir nulle part ?
"J'ai toujours voulu que les filles
gardent les pieds sur terre et que le rugby ne leur fassent pas tourner
la tête, assure Courteix. Qu'elles ne perdent pas de vue ce qu'il y a à
côté du rugby. Mais peut-être faut il assumer que la priorité
aujourd'hui c'est d'abord d'aller aux Jeux."
Les résultats, à
commencer par ceux obtenus à Dubaï jeudi et vendredi, donneront un
premier élément de réponse sur la capacité des joueuses à tout mener de
front.
(AFP)
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