mercredi 3 décembre 2014

Les filles du VII visent l'Olympe par la voie du professionnalisme

En passant 16 joueuses de rugby à VII sous contrat semi-professionnel, la Fédération française espère donner à ses Bleues les moyens de leur ambition olympique, mais les difficultés d'organisation restent nombreuses pour des joueuses qui doivent tout concilier.

David Courteix, l'entraîneur de l'équipe de France dames de rugby à VII, était contrarié en ce gris mardi de novembre: ses filles venaient d'effectuer "l'entraînement le plus moyen depuis le début de la saison, et de loin", à quelques jours de s'envoler pour le tournoi de Dubaï, qui débute ce jeudi et marque le premier rendez-vous de cette année de qualification pour les JO de Rio-2016.
Mais l'objet profond de son tracas est autre: voir le temps et l'énergie de ses joueuses écartelés entre leurs études ou emplois et les entraînements.
Pourtant, depuis septembre, la FFR a entamé une petite révolution en créant le "Centre d'entraînement féminin de rugby à VII" au sein duquel 16 joueuses bénéficient d'un contrat semi-professionnel.
"Ça me paraissait incontournable pour espérer suivre l'évolution actuelle du rugby féminin, assure David Courteix. La quasi-totalité des équipes qui courent après une qualification olympique sont complètement professionnelles. Et c'est parfois étonnant: le Brésil et les Pays Bas sont pro, les Etats-Unis, le Canada aussi."
Le Centre nourrit donc l'équipe de France: sur les 12 joueuses parties pour Dubaï, 10 en sont issues. L'idée est d'exploiter au maximum le potentiel du "réservoir de très bonnes joueuses", dixit Courteix, en leur offrant d'abord une vraie préparation physique.
"Parfois, sur le plan athlétique, il y a eu des équipes bien moins bonnes que nous au rugby qui nous mettaient en difficulté", souligne ainsi l'entraîneur.

- Risque d'éparpillement - Concrètement, l'année a été divisée en trois périodes: une dédiée à la compétition, "où elles sont à 100% avec la Fédération" ; une dite de "préparation physique en autonomie", où les joueuses "s'entraînent seules en suivant un programme établi à l'avance" ; et des périodes "à mi-temps", "les plus épineuses" car il faut "mixer les emplois du temps des unes et des autres", soupire David Courteix.
Un casse-tête car certaines des joueuses sont étudiantes, à distance ou sur le banc des amphithéâtres, quand d'autres ont une activité, mais sur des rythmes variables: l'une est infirmière intérimaire, l'autre pompier ou encore ingénieur cryptologue au CNRS !
"Pour être sûr d'avoir tout le monde, il faut donc s'entraîner le soir", résume David Courteix.
Au quotidien, cela donne "des emplois du temps très chargés mais on le fait car on connaît l'objectif au bout", explique la talonneur Camille Grassineau, également ailier à XV durant le dernier Mondial.
Elle est étudiante à Bordeaux et prépare un brevet d'éducateur sportif. Ce contrat l'a donc poussée à changer de ville pour s'installer plus près de Marcoussis (Essonne) où se trouve le centre, en suivant ses cours à distance, plutôt le matin.
"Désormais, je passe le plus clair de mon temps à penser rugby et au VII en particulier", détaille cette "hyper-active" qui évolue aussi à XV au Stade Bordelais, où elle s'occupe certains mercredis et samedis d'encadrement à l'école de rugby.
Forcément, cela demande un sens pointu de l'organisation. "On pourrait les aider davantage dans l'apprentissage de leur autonomie au quotidien, dans la gestion de leur temps", souffle ainsi David Courteix.
Car la question est là: en poursuivant un objectif scolaire ou professionnel d'un côté et sportif de l'autre, les joueuses ne risquent-elles pas de s'éparpiller au risque de ne réussir nulle part ?
"J'ai toujours voulu que les filles gardent les pieds sur terre et que le rugby ne leur fassent pas tourner la tête, assure Courteix. Qu'elles ne perdent pas de vue ce qu'il y a à côté du rugby. Mais peut-être faut il assumer que la priorité aujourd'hui c'est d'abord d'aller aux Jeux."
Les résultats, à commencer par ceux obtenus à Dubaï jeudi et vendredi, donneront un premier élément de réponse sur la capacité des joueuses à tout mener de front.

(AFP)

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Journaliste spécialisé dans l'actualité sportive, j'ai collaboré, entre autres, à So Foot, Libération, Radio France Internationale. Aujourd'hui, je suis particulièrement les politiques sportives au plan national et dans les collectivités locales pour Localtis.