mercredi 22 avril 2015

Rififi dans le monde feutré des grandes fédérations sportives et du CIO

Dans le monde feutré des grandes fédérations sportives, les dagues sont de sortie : pour la première fois depuis son élection en 2013, le président du Comité international olympique (CIO) Thomas Bach a été ouvertement critiqué, un événement rare mais révélateur d'un malaise.

Au sommet du sport mondial, le linge sale se lave généralement dans la discrétion. A Sotchi, en Russie, mardi, le patron de SportAccord, Marius Vizer, l'a fait en public, devant toute la presse mondiale, en accusant le président du CIO d'"interférer dans l'autonomie des organisations sportives".
"En plus de 30 ans, je n'avais jamais vu cela. Son discours était totalement inattendu", a commenté pour l'AFP M. Ching-Kuo Wu, président taïwanais de l'Association internationale de boxe amateur (AIBA) et membre du CIO, venu lui aussi à Sotchi pour le grand raout annuel de SportAccord.
Parmi les 107 fédérations sportives membres de SportAccord, toutes n'ont pas apprécié ce langage. Deux fédérations, celle d'athlétisme (IAAF), pourtant principal parrain de SportAccord, et de tir (ISSG), ont ainsi décidé de claquer la porte de l'organisation. Après avoir cosigné avec 13 autres fédérations, dont celle de M. Wu, une lettre de soutien à M. Bach.
Président de SportAccord et de la Fédération internationale de judo, mais candidat malheureux depuis longtemps pour un fauteuil au CIO, M. Vizer n'a pas mâché ses mots lundi, accusant Thomas Bach "de bloquer la stratégie" de son organisation "dans sa mission d'identifier et d'organiser des jeux multi-sports". Elu à la tête de SportAccord en 2013 face au Français Bernard Lapasset, le président de l'IRB, la Fédération internationale du rugby, M. Vizer reproche en fait au CIO de vouloir avoir la main-mise sur l'ensemble du mouvement sportif.

- 'Un séisme ? Non' - L'Agenda 2020 adopté sous la houlette de M. Bach "n'apporte presque pas de bénéfice au sport, aux Fédérations ou aux athlètes", a-t-il accusé.
"Pour avoir parlé avec plusieurs de vos collègues, j'ai l'impression que votre opinion ne reflète que vous-même", a rétorqué M. Bach, qui a eu ensuite un entretien avec le président russe Vladimir Poutine, puis a assisté en fin de soirée à un grand spectacle de patinage sur glace, "sans modifier son programme".
Le discours de M. Vizer "était malvenu et son attitude impolie", a confié un président de fédération. "Les ressentiments, pas seulement personnels, couvent depuis longtemps et peuvent parfois se comprendre", a cependant ajouté un autre responsable d'une petite fédération, sous couvert d'anonymat.
M. Vizer "n'est pas d'accord avec ce que le CIO veut faire grâce à l'Agenda 2020", train de réformes qui vise globalement à faire baisser le coût des jeux Olympiques. "Mais cet agenda a été adopté à l'issue d'un processus totalement démocratique. Les 40 recommandations ont été adoptées et tout le monde était satisfait", a insisté M. Wu.
"Est-ce un séisme ? Non", a expliqué un bon connaisseur du mouvement olympique. "M. Vizer a tenté un pari, pour des raisons personnelles et pour réaffirmer l'autonomie des grandes fédérations. Mais il risque de subir très vite le retour du boomerang".
Premier épisode : l'Association des fédérations internationales des sports olympiques d'été (ASOIF) a réaffirmé elle aussi mardi son soutien à M. Bach et a "suspendu son association avec SportAccord", abandonnant encore un peu plus à son isolement le président judoka, qui a quelque peu raté son ippon.

(AFP)

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Journaliste spécialisé dans l'actualité sportive, j'ai collaboré, entre autres, à So Foot, Libération, Radio France Internationale. Aujourd'hui, je suis particulièrement les politiques sportives au plan national et dans les collectivités locales pour Localtis.