Accusé par l'ONG Sherpa de travail forcé sur ses chantiers au Qatar,
le géant du BTP Vinci a plaidé mercredi la première manche de sa riposte
judiciaire en poursuivant l'ONG pour atteinte à la présomption
d'innocence.
L'association Sherpa a déposé plainte à Nanterre fin
mars contre Vinci, notamment pour "travail forcé" et "réduction en
servitude", dans le cadre des chantiers liés à l'organisation du Mondial
2022 de football. Sa plainte a donné lieu à l'ouverture d'une enquête
préliminaire afin de vérifier les allégations mettant en cause le géant
du BTP.
Lors d'une audience de référé (procédure d'urgence) devant
le tribunal de grande instance de Paris mercredi, l'avocat de Vinci,
Jean-Pierre Versini-Campinchi, a fait état de l'"attaque médiatique
absolument extraordinaire" lancée par Sherpa.
Vinci a demandé la
condamnation de Sherpa, la publication d'un communiqué judiciaire sur le
site internet de l'ONG et la communication de la plainte, que la presse
a eue, mais pas le groupe, a souligné Me Versini-Campinchi.
Cette
dernière demande n'a "aucun fondement juridique", a plaidé l'avocate de
Sherpa, Me Léa Forestier, dénonçant une "poursuite bâillon".
Elle
a dénoncé le "choix très clair" de Vinci, qui a par ailleurs engagé des
poursuites en diffamation, de s'engager sur la voie d'un "acharnement
judiciaire" plutôt que "d'ouvrir un débat public".
La décision sera rendue le 30 juin.
Pour
l'avocat William Bourdon, président de Sherpa, la procédure vise à
"rassurer les fonds de pension éthiques, rassurer les actionnaires qui
sont inquiets" des "révélations" de l'ONG et de la plainte. On est
"serein", "habitué" et "tout à fait tranquille", a-t-il déclaré après
l'audience, où chaque camp a dénoncé l'opération de communication de la
partie adverse.
Il s'en est pris à la "logique de +pas vu pas
pris+ qui permet" à de grandes entreprises "de continuer à communiquer" à
propos de leurs engagements éthiques "tout en fermant les yeux sur des
comportements qui sont parfaitement contradictoires". "L'image éthique
est devenue un capital de séduction et d'attraction", mais aussi le
"talon d'Achille" de ces groupes, a-t-il affirmé à l'audience.
Le
PDG de Vinci, Xavier Huillard, s'est fait le porte-parole de
l'"indignation" des 190.000 collaborateurs du groupe face aux "attaques
désinvoltes, irresponsables, très puissantes" de Sherpa, dont il a
réfuté en bloc les accusations.
"Je peux vous certifier que nos
standards en matière de sécurité sur les chantiers, en matière de
conditions de vie de nos travailleurs" au Qatar sont "parmi les
meilleurs", a ajouté M. Huillard.
Si "certaines choses sont encore
perfectibles", a-t-il concédé, "dans le périmètre que nous maîtrisons
(...) les choses se font de manière tout à fait parfaite", "conformément
à nos normes, qui sont elles-mêmes très supérieures aux normes en
vigueur au Qatar", a-t-il dit.
Il a également fait état, qu'en
janvier, avant les accusations de Sherpa, Vinci avait organisé un
déplacement au Qatar des syndicats de l'entreprise. Ceux-ci ont témoigné
"de ce qu'ils ont vu et de ce qu'ils ne comprenaient absolument pas le
pourquoi des attaques incroyablement virulentes" de Sherpa.
(AFP)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire