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mercredi 11 décembre 2013

A Chypre, l'éclosion d'une petite nation de rugby qui s'ignore

Les Chypriotes n'en savent rien mais leur équipe de rugby, certes loin de l'élite mondiale, vient néanmoins de conclure sa 21e victoire d'affilée, un joli succès dû à une diaspora passionnée et à l'émulation offerte par les soldats britanniques ou les Casques bleus.

Il y avait moins de 500 spectateurs fin novembre à Paphos (ouest) pour voir les "Mouflons" chypriotes l'emporter 22-8 face à l'Autriche à l'issue d'un match un peu désordonné et très engagé.
Et que ce soit sur le terrain, dans les tribunes ou au pub après le match, l'anglais dominait largement, trahissant la double culture des joueurs et des supporteurs. Chypriote certes, mais aussi britannique ou sud-africaine.
Le rugby à Chypre s'est longtemps cantonné aux deux bases militaires britanniques ou aux contingents argentins et australiens de l'ONU chargés de veiller sur la ligne de démarcation de l'île coupée en deux depuis l'invasion turque de 1974.
Les civils locaux ne s'y sont mis qu'au début des années 2000, quand de nombreux Chypriotes expatriés en Afrique du Sud sont revenus vivre sur l'île.
Ils ont créé en 2003 le club des Paphos Tigers. Après la création en 2004 des Limassol Crusaders et des Nicosia Barbarians, le rugby chypriote s'est organisé en fédération, rappelant des compatriotes installés au Royaume-Uni pour monter une équipe nationale.
Depuis leurs débuts en mars 2007 et une victoire (39-3) en match amical contre la Grèce, les Mouflons n'ont enregistré qu'une défaite, en septembre 2008 en Israël, en 26 rencontres internationales.
Mais Chypre n'a pas pu disputer les qualifications pour le Mondial-2015 car sa fédération n'est pas encore membre à part entière de l'International Rugby Board (IRB, organe suprême du jeu). Elle doit pour cela compter un minimum de quatre clubs locaux et si le championnat chypriote aligne actuellement sept équipes, quatre viennent des bases britanniques.
Sa série de 21 victoires n'est d'ailleurs pas reconnue par l'IRB, alors qu'elle constitue une meilleure performance que le record actuel de 18 succès consécutifs détenu par la Lituanie.
Pour progresser, le rugby chypriote doit se développer au-delà du cercle des anciens Sud-Africains et des expatriés. Mais la fédération, qui vivote avec une subvention annuelle de 30.000 euros --le coût d'un match à l'extérieur-- et peine à trouver des sponsors en pleine récession, n'a que la passion du jeu à offrir.
"Beaucoup des anciens sont en train de passer à autre chose et des nouveaux arrivent. Avec nous, chacun a sa chance", fait valoir le capitaine emblématique Tony Thoma, talonneur de 36 ans revenu d'Afrique du Sud en 2001.
Elevé en Angleterre, Yannis Loizias, formé dans le club des Harlequins à Londres, a "bien ri" quand son père chypriote lui a suggéré de saisir cette chance. Mais à 18 ans, cet arrière a été titularisé dès sa première convocation début novembre en Slovénie (victoire 34-3).
Jouer pour son pays, "c'est le plus grand honneur possible. Cette passion, c'est notre force. De l'hymne national jusqu'à notre cri de guerre à la fin", renchérit Marcus Holden, arrière de 24 ans et international depuis 2008, qui joue à Figeac (Fédérale 2).
Comme d'autres, il reconnaît cependant qu'à force de monter, Chypre finira par atteindre un niveau où les victoires seront moins systématiques: "Cela sera complètement différent alors. Mais d'ici là, je suis content de faire partie d'un record du monde".

(AFP)

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