Les Chypriotes n'en savent rien mais leur équipe de rugby, certes
loin de l'élite mondiale, vient néanmoins de conclure sa 21e victoire
d'affilée, un joli succès dû à une diaspora passionnée et à l'émulation
offerte par les soldats britanniques ou les Casques bleus.
Il y
avait moins de 500 spectateurs fin novembre à Paphos (ouest) pour voir
les "Mouflons" chypriotes l'emporter 22-8 face à l'Autriche à l'issue
d'un match un peu désordonné et très engagé.
Et que ce soit sur le
terrain, dans les tribunes ou au pub après le match, l'anglais dominait
largement, trahissant la double culture des joueurs et des supporteurs.
Chypriote certes, mais aussi britannique ou sud-africaine.
Le
rugby à Chypre s'est longtemps cantonné aux deux bases militaires
britanniques ou aux contingents argentins et australiens de l'ONU
chargés de veiller sur la ligne de démarcation de l'île coupée en deux
depuis l'invasion turque de 1974.
Les civils locaux ne s'y sont
mis qu'au début des années 2000, quand de nombreux Chypriotes expatriés
en Afrique du Sud sont revenus vivre sur l'île.
Ils ont créé en
2003 le club des Paphos Tigers. Après la création en 2004 des Limassol
Crusaders et des Nicosia Barbarians, le rugby chypriote s'est organisé
en fédération, rappelant des compatriotes installés au Royaume-Uni pour monter une équipe nationale.
Depuis
leurs débuts en mars 2007 et une victoire (39-3) en match amical contre
la Grèce, les Mouflons n'ont enregistré qu'une défaite, en septembre
2008 en Israël, en 26 rencontres internationales.
Mais Chypre n'a pas pu disputer les qualifications pour le Mondial-2015 car sa fédération n'est pas encore membre à part entière de l'International Rugby Board
(IRB, organe suprême du jeu). Elle doit pour cela compter un minimum de
quatre clubs locaux et si le championnat chypriote aligne actuellement
sept équipes, quatre viennent des bases britanniques.
Sa série de
21 victoires n'est d'ailleurs pas reconnue par l'IRB, alors qu'elle
constitue une meilleure performance que le record actuel de 18 succès
consécutifs détenu par la Lituanie.
Pour progresser, le rugby chypriote doit se développer au-delà du cercle des anciens Sud-Africains et des expatriés. Mais la fédération,
qui vivote avec une subvention annuelle de 30.000 euros --le coût d'un
match à l'extérieur-- et peine à trouver des sponsors en pleine
récession, n'a que la passion du jeu à offrir.
"Beaucoup des
anciens sont en train de passer à autre chose et des nouveaux arrivent.
Avec nous, chacun a sa chance", fait valoir le capitaine emblématique
Tony Thoma, talonneur de 36 ans revenu d'Afrique du Sud en 2001.
Elevé
en Angleterre, Yannis Loizias, formé dans le club des Harlequins à
Londres, a "bien ri" quand son père chypriote lui a suggéré de saisir
cette chance. Mais à 18 ans, cet arrière a été titularisé dès sa
première convocation début novembre en Slovénie (victoire 34-3).
Jouer
pour son pays, "c'est le plus grand honneur possible. Cette passion,
c'est notre force. De l'hymne national jusqu'à notre cri de guerre à la
fin", renchérit Marcus Holden, arrière de 24 ans et international depuis
2008, qui joue à Figeac (Fédérale 2).
Comme d'autres, il
reconnaît cependant qu'à force de monter, Chypre finira par atteindre un
niveau où les victoires seront moins systématiques: "Cela sera
complètement différent alors. Mais d'ici là, je suis content de faire
partie d'un record du monde".
(AFP)
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