La ministre des Sports, Valérie Fourneyron, a lancé avec le CSA plusieurs actions
de promotion du sport féminin. Une ambition compliquée à mettre en oeuvre.
SI VOUS AVEZ culpabilisé d’avoir raté la démonstration de l’équipe de France de foot
féminin,
le 28 novembre dernier (14-0 contre la Bulgarie),
tranquillisez-vous, le match n’était pas
diffusé, hormis sur le site de la fédération. La
sous-médiatisation du sport féminin est un
problème récurrent en France et en Europe,
même pour un sport pourvoyeur d’audience
comme le football féminin . En l’occurrence, les
Bleues pâtissent en ce moment d’un changement
de politique de Direct 8, propriétaire de
leurs droits de diffusion, qui ne veut plus consacrer
son antenne au sport. Mais, de façon générale,
les diffuseurs se montrent assez peu
pressés de mettre des sportives à l’antenne. Les
compétitions féminines représentent seulement 7%
des épreuves diffusées en France, selon une
étude du Conseil supérieur de l’audiovisuel
en 2012.
Pour y remédier, le CSA et le ministère des
Sports ont pris plusieurs mesures, afin de contourner
les difficultés qui empêchent la promotion des
sportives à l’écran.
Imposer la diffusion du sport féminin s’avère
en effet hasardeux. « D’un point de vue légal,
des quotas de diffusion devraient se conformer
au principe de libre prestation des ervices et celui
de libre expression. Un quota contraignant
pourrait donner lieu à une contestation judiciaire
», expose ainsi Benoît Keane, avocat spécialisé dans
le sport et le droit communautaire.
Le ministère des Sports a donc préféré la manière
douce en annonçant, le 27 novembre dernier,
la création d’un fonds de soutien à la médiatisation du
sport féminin et handisport de
1M€, confié au Centre national pour le développement
du sport (CNDS). L’idée est de prendre
en charge une partie du coût de financement de
la production télévisée des matches (le chiffre
reste à fixer,mais sans doute autour de 50%),
pour inciter les chaînes à diffuser des épreuves
qu’elles ne retransmettaient pas. La ministre
des Sports, Valérie Fourneyron, compte ainsi
créer un«cercle vertueux » amenant un «développement de
la pratique, un développement
des partenariats et un développement du potentiel
économique des sports concernés».
Mais alors que les diffuseurs vont être mis à
contribution par un élargissement de l’assiette
de la taxe Buffet, le fonds suscite chez plusieurs
d’entre eux des avis mitigés. «Il ne faut
pas confondre l’aide qu’on peut apporter et l’intérêt que
ça peut avoir pour une chaîne, estime
par exemple Daniel Bilalian, le directeur des
sports de France Télévisions. Nous faisons ce
qui est nécessaire dans la limite de nos possibilités,
nous sommes une chaîne généraliste.»
Même chez Eurosport, qui mise beaucoup
sur le sport féminin, la mesure fait tiquer. L’aide
du CNDS est en effet réservée aux chaînes gratuites,
ce qui exclut donc une chaîne payante
comme elle. «Si on doit payer notre production
alors qu’une chaîne gratuite peut être subventionnée
pour le faire, ça peut créer une distorsion
de concurrence et être contre-productif »,
argumente Arnaud Simon, le directeur général
de la chaîne. Il faudra donc attendre le mois de
mars, quand les premiers dossiers devraient
arriver au CNDS, pour voir si l’incitation fonctionne.
En attendant, le CSA a lui aussi pris plusieurs
mesures pour résoudre le problème. Christine
Kelly, présidente de la mission sport au conseil,
a notamment poussé les chaînes de télévision
et de radio à organiser le 1er février prochain
une journée consacrée au sport féminin. Surtout,
le CSA et le ministère ont transmis à la
Commission européenne un projet de « féminisation
» du décret français sur les événements
d’importance majeure qui oblige les
chaînes payantes à mettre sur le marché certains matches
pour assurer leur diffusion en
clair. Si la commission donne un avis favorable,
cela permettrait en principe (les chaînes
ne sont pas obligées d’acheter) de voir tous les
matches l’équipe de France féminine de foot en
clair, comme ceux des Bleus.
(L'Equipe)
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