Après un moment de cafouillage – qui a duré toute la journée d’hier –
une instruction claire est tombée hier soir du ministère de la Ville :
la retransmission des matches de l’Euro-2016, qui commence ce soir, aux
terrasses des bars, ne sera pas interdite mais laissée à la décision des
maires, « en lien étroit avec les préfets ».
La polémique a commencé fin mai, à Marseille, lorsqu’une « note » de la
mairie – et non un arrêté municipal – est envoyée aux cafetiers pour
leur demander de ne pas installer de télévisions grands écrans en
terrasse, pour des raisons de sécurité. Pour justifier sa décision, la
mairie invoque une circulaire interministérielle du 22 février qui
interdit la retransmission sur écrans géants dans des lieux ouverts en
dehors des fans-zones. Tollé chez les cafetiers de Marseille d’abord,
puis au niveau national : de nombreux établissements ont dépensé
plusieurs milliers d’euros pour acheter des téléviseurs, et se disent
stupéfaits d’être prévenus si tard. Marcel Bénezet, responsable de la
branche Cafés, bars et brasseries au sein du du Syndicat national des
hôteliers, restaurateurs, cafetiers et traiteurs, ne décolérait pas,
hier : « Trop, c’est trop ! La coupe est pleine ! On nous avertit la veille pour le lendemain, on veut nous mettre à genoux. »
Hier matin, le secrétaire d’État aux Sports, Thierry Braillard, jette un
peu plus d’huile sur le feu en allant dans le même sens que la mairie
de Marseille. Interrogé sur RMC, il déclare : « J’en appelle à la
responsabilité de chacun. (…) Mieux vaut un site très sécurisé que de
laisser faire des milliers de personnes de façon désorganisée. (…) On ne
peut pas accepter qu’il y ait des rassemblements non autorisés. »
Dans la journée, le ministère de l’Intérieur refuse de s’exprimer. Puis,
hier soir, c’est le ministre de tutelle de Thierry Braillard, Patrick
Kanner, ministre de la Ville, de la Jeunesse et des Sports, qui met fin à
la polémique : son cabinet indique à l’AFP qu’il n’y a pas
d’interdiction pour les cafetiers d’installer des télévisions aux
terrasses, mais qu’il « revient aux maires, en lien étroit avec les
préfets, de prendre toute mesure permettant d’éviter que ces diffusions
ne se transforment en regroupements sur la voie publique ». Voilà qui devrait calmer les patrons de bars… mais promet quelques sueurs froides aux maires.
Quelle est la source de cette polémique ? Apparemment, d’une différence
d’appréciation sur le contenu de la fameuse instruction ministérielle du
22 février, laquelle interdit, effectivement, les retransmissions sur
« grand écran » en dehors des fans-zones. Sauf qu’en l’espèce,
« grand écran» ne désigne pas les télévisions acquises par les
cafetiers, mais des dispositifs spéciaux destinés à une diffusion pour
un large public, et installés sur la voie publique. Et surtout, que
l’instruction s’adresse clairement non à des personnes privées mais aux
communes. Elle dit en effet : « Les espaces publics où se déroulent
les retransmissions sur grand écran peuvent parfois rassembler plusieurs
milliers de spectateurs (…). Aussi, il conviendra de faire savoir aux
élus désireux d’organiser de tels événements que les retransmissions sur
grand écran (…) ne pourront être organisées sur l’espace public ouvert,
mais dans des espaces clos dont l’accès sera contrôlé. »
Si cette instruction s’adresse donc aux maires, cela ne règle pas pour
autant la question des cafés. On sait que certains établissements vont
plus loin que la diffusion sur une grande télévision et utilisent par
exemple des vidéoprojecteurs avec projection sur grand écran. On imagine
aisément comment certaines de ces projections pourraient attirer des
centaines de spectateurs, créant des zones difficiles à sécuriser. S’il
n’y a donc plus d’interdiction formelle d’installer des télévisions en
terrasses de cafés – qui aurait été de toute façon impossible à faire
respecter – il n’en reste pas moins que le mois à venir va être
difficile à gérer pour les maires et les forces de l’ordre. Rien ne dit
que certains élus et préfets ne choisiront pas, pour des raisons
évidentes de sécurité, d’empêcher certains rassemblements de se former,
quitte à se fâcher avec des patrons de café.
(Maire info)
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