Canal+ a finalement conservé les droits de retransmission du Top 14
jusqu'en 2019, comme attendu mais au terme de plusieurs mois de suspense
et de rebondissements qui ont porté l'affaire jusque dans les
tribunaux.
Cette décision, prise mardi soir par la Ligue nationale
de rugby (LNR), laisse toutefois plusieurs questions en suspens,
notamment sur l'utilisation qui sera faite de cette manne substantielle
(355 millions sur 5 ans).
QUESTION: Pourquoi la Ligue a-t-elle fini par choisir Canal+?
REPONSE:
Au départ, la Ligue nationale (LNR) a tenté de négocier de gré à gré
avec Canal + pour obtenir davantage que les 31,7 millions d'euros par
saison perçus depuis 2011. Les deux parties ne sont pas parvenues à un
accord, ce qui a entraîné la résiliation du contrat le 3 décembre par la
LNR, qui tablait sur l'appétit de BeInSports.
Se disant furieux,
les représentants de Canal + ont alors déposé 4 recours devant les
tribunaux tout en menaçant de ne pas répondre à l'appel d'offre lancé
par la LNR. Ce qui a forcé la LNR à suspendre la procédure le 10
janvier.
Tout est ensuite allé très vite, à la surprise générale.
"Canal+ a pris contact avec nous dès le samedi (11 janvier), a relaté
le président de la LNR Paul Goze. Une offre nous a été portée (mardi) à
la mi-journée, valable deux jours." Et donc immédiatement acceptée en
comité directeur de la Ligue, grâce notamment au geste financier
consenti par la chaîne: 71 millions d'euros en moyenne par saison
jusqu'en 2019. Selon M. Goze, qui a aussi mis en avant le principe de
"fidélité" avec son diffuseur depuis 1998, Canal a sensiblement étoffé
son offre sur une multitude de points.
Q: Que va faire BeInSports?
R: Depuis l'annonce mardi soir,
la chaîne s'est murée dans le silence. "No comment", s'est-elle bornée à
répondre à l'AFP. "C'est sûr que BeInSports pourrait dire qu'elle n'a
pas eu toutes les chances de pouvoir s'exprimer sur ce dossier", a
reconnu M. Goze, assurant toutefois avoir "été correct" avec la chaîne.
"J'ai appelé (les dirigeants de BeInSports) dès la fin du comité
directeur, a-t-il souligné. Ils m'ont dit qu'ils regrettaient. Je leur
ai dit que le rugby, ce n'était pas que le Top 14 et qu'on pourrait
reprendre langue sur d'autres dossiers".
Interrogé sur un éventuel
recours judiciaire de la chaîne qatarie contre la LNR, M. Goze a
affirmé que la Ligue n'avait "rien fait de contraire à la règle" et que
le risque portait plus sur "un procès contre Canal+, concernant le droit
à la concurrence et l'hégémonie d'un diffuseur".
Q: Davantage d'argent... mais pour quoi faire?
R: C'est la
grande question qui se pose désormais. Avec cet apport supplémentaire de
40 millions d'euros par saison, la Ligue voit grand. Cela devrait
permettre de financer le dispositif incitatif des "Jiff" (Joueurs issus
des filières de formation) destiné à favoriser la formation et le nombre
de joueurs français alignés en Top 14. Dans un contexte économique
difficile, la manne devrait aussi assainir la situation de certains
clubs en difficulté. Et donner un sérieux coup de pouce à la Pro D2, qui
récupère 30% des reversements des droits TV du Top 14.
Mais en
coulisses, certains présidents de club pensent à remettre en cause cet
équilibre, même si M. Goze balaie cette hypothèse en rappelant que "le
principe de solidarité est depuis toujours un moteur de la Ligue".
Cependant,
interrogé mercredi par le quotidien La Provence, le président de Toulon
Mourad Boudjellal a d'ores et déjà prévenu qu'il pourrait quitter le
Top 14 si la redistribution des droits ne se faisait pas "de manière
rationnelle", c'est-à-dire proportionnellement aux audiences.
L'argent
supplémentaire servira-t-il à accélérer le recrutement de grands noms
étrangers? Paul Goze s'en défend. Cette manne permettra-t-elle aux plus
riches de s'attaquer au "salary cap" (plafond salarial, fixé à 10
millions d'euros pour chaque club)? C'est un risque dont les contours
s'affinent un peu plus.
(AFP)
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