Le Grand Stade souhaité par la Fédération française de rugby à l'horizon
2018 a passé jeudi soir son premier oral pour convaincre le grand
public de l'opportunité du projet, jugé démesuré par les uns, vital pour
le développement du rugby pour d'autres.
Depuis quelques années,
le rugby français a décidé qu'il ne voulait plus du Stade de France où
il joue depuis 1998, mais qu'il lui fallait sa propre enceinte.
Objectif : maîtriser l'agenda du XV de France et du Top 14, sans
problèmes de "conflit de pelouse" avec le football, et profiter
pleinement des retombées financières générés par les grands matches.
Mais le dossier suscite bien des controverses. Et environ 500 personnes - élus locaux, riverains ou amateurs de rugby
- ont participé jeudi à Ris-Orangis (Essonne) à la réunion d'ouverture
du débat public concernant cette enceinte multimodale, prévue pour
accueillir 82.000 personnes à partir de 2018.
Plus qu'un stade,
une "aréna" avec toit rétractable, pelouse mobile, musée et espaces VIP,
confiée aux architectes qui ont conçu le stade de Wembley à Londres ou
le Millenium Stadium de Cardiff.
"Le projet a été lancé en 2009
pour que la FFR ait les moyens de ses ambitions", a expliqué son
président, Pierre Camou : "Nous voulons avoir la liberté de jouer où et
quand nous voulons, et ne pas devoir demander l'aumône aux autres".
Une ambition essentielle pour l'économie du rugby, selon Paul de
Keerle, directeur financier de la fédération. "Toute l'économie du rugby
repose sur les matches du XV de France. Si la fédération ne peut pas
jouer un match, en terme de revenus, c'est catastrophique", a-t-il
expliqué, rappelant que les trois-quarts des recettes annuelles de la
fédération provenaient des Bleus.
Le débat public, qui va durer quatre mois, devra permettre au rugby
français de convaincre. Car tout le monde n'est pas aussi enthousiaste.
Récemment, un rapport du Sénat a ainsi clairement pris position contre
le projet, jugeant "déraisonnable" notamment la concurrence avec le
Stade de France, sans aucun club résident dans aucune des deux
structures.
"Une telle concurrence risquerait fort de mettre en
péril le modèle économique d'au moins l'un des deux stades, sinon des
deux", estimait le rapport.
Jeudi, le public a posé d'autres
questions, parfois avec véhémence: "Y aura-t-il toujours de la place
pour le rugby amateur?", "Quel sera l'impact sur nos impôts locaux?",
"Et moi, famille modeste, qu'est-ce que j'y gagne?"... "Quid d'un
club résident?", a demandé un autre participant, alors que le
Racing-Metro joue à Colombes et le Stade français à Jean Bouin. "Avoir
un club résident qui joue tous les week-ends bloque tout le reste des
spectacles sur l'année. Donc ce n'est pas la panacée", s'est défendu M.
Camou. La concurrence avec le Stade de France? "Je ne vois pas ce
qu'il y a d'inconvenant à ce que deux grands sports aient chacun leur
enceinte", a-t-il assuré. "Nous sommes en période de crise, les
usines ferment, est-ce bien pensé d'installer un stade de 82.000
places?", a-t-on encore entendu.
La construction serait financée par le
privé, 600 millions d'euros réglés par la FFR sur ses fonds propres pour
un tiers et par le recours à l'emprunt pour le reste, a-t-il rétorqué.
"A aucun moment l'argent public n'a été sollicité", a confirmé pour sa
part Stéphane Raffalli, le maire de Ris-Orangis, ville de l'Essonne
choisie pour accueillir l'enceinte.
Mais l'argument ne suffira
peut-être pas. A l'issue de sept réunions, les organisateurs feront
remonter aux maîtres d'ouvrage - la FFR et les collectivités locales -
les différentes observations du public.
Avant de s'accorder trois mois de plus pour décider si le projet continue ou pas.
(AFP)
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