Le bulletin d'informations juridiques sportives Légisport, édité par l'avocat marseillais spécialisé en droit du sport Michel Pautot, consacre son numéro de mai-juin 2014 aux équipements sportifs. Extraits...
Historiquement, l’organisation des services publics étaient du ressort de l’Administration, qui les gérait au moyen de régies. La crise des budgets publics a motivé l’Etat et collectivités à s’orienter vers de nouveaux modes de financement des services et équipement destinés à servir l’intérêt général, par le recours à des entités privées.
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Le partenaire privé prend à sa charge les frais d’étude et de construction et se rémunère par la suite en se voyant consentir un bail sur une durée de 20 à 50 ans en général, période durant laquelle la personne publique paye le prix de l’ouvrage de façon étalée (sous forme de loyers), et le partenaire privé se rémunère en exploitant l’équipement.
Les loyers versés par la collectivité locale sont calculés en fonction de résultats d’exploitation réalisés par le partenaire privé, lesquels sont stipulés au contrat.
Ce mode de financement des ouvrages destinés à servir l’intérêt général, comme les établissements pénitentiaires, les hôpitaux ou les stades, a pour principal avantage le fait de ne pas grever immédiatement les budgets publics déjà en berne, et ce qu’autant plus que ce type d’investissements est très coûteux.
A ce titre, depuis sa mise en place, le PPP connaît un véritable engouement. Cependant, en France, comme à l’étranger où des systèmes similaires sont en place, des voix s’élèvent, de façon justifiées contre ce type de contrats qui n’est pas sans d’importants défauts.
Economiser aujourd’hui, payer (beaucoup) plus cher demain ?
Ce partenariat est de prime abord séduisant pour la personne publique, qui peut se voir livrer un équipement sans grever son budget dans l’immédiat. Néanmoins, l’étalement du paiement sur plusieurs dizaines d’années représente un poids supplémentaire durable dans les dépenses publiques d’autant plus qu’en définitive le prix payé est en général supérieur à celui du remboursement d’un emprunt. En effet, dans la mesure où le partenaire privé va lui-même emprunter pour financer la construction de l’ouvrage, les intérêts dont il s’acquittera seront automatiquement répercutés sur les loyers.
D’autre part, la gestion par le partenaire privé risque de se faire dans une optique purement commerciale, là où la vocation primordiale de l’équipement est le service de l’intérêt général. Dans ce cas, il appartient à la collectivité de se montrer vigilant quant aux objectifs fixés par le contrat de partenariat.
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En la matière, la France a connu de nombreux déconvenues économiques en quelques années. C’est le cas de la MMArena et du Stade des Alpes, enceintes flambant neuves de plus de 20 000 places, conçues pour accueillir les rencontres des modestes Mans F.C. et Grenoble Foot 38, deux équipes aujourd’hui reléguées dans le championnat amateur.
L’Euro 2004 de football au Portugal a vu se multiplier ces exemples. En effet, 9 stades ont été construits pour l’occasion, pour un taux de remplissage de seulement 44% aujourd’hui, l’un d’entre eux ayant été purement et simplement abandonné par son club résident, lequel lutte pour régler son loyer avec un taux de remplissage de 10%.
Il y a donc fort à parier que les PPP conclus par les collectivités locales en vue de l’Euro 2016 risquent de peser durablement sur leurs finances pendant des décennies, vu la forte probabilité que ces enceintes sportives sonnent creux une fois les festivités achevées.
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Le PPP n’est pas donc intrinsèquement un mauvais système. Mais les collectivités doivent y avoir recours avec parcimonie et clairvoyance. Si l’on comprend bien la tentation des édiles d’offrir à leurs administrés la promesse que leur équipe locale gagnera la Ligue des Champions grâce à un prestigieux écrin, il faut garder à l’esprit que ce type de contrat engagera durablement sa commune… et que les générations à venir payeront la facture de leurs rêves de grandeur.
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