Bernard Le Courtois, ex-président de l'Association nationale du selle
français (ANSF), estime, en marge des Jeux équestres mondiaux à Caen,
que les races des chevaux de sport, dédiées principalement au saut
d'obstacles, vont "s'européaniser", chacune préservant toutefois ses
caractéristiques de terroir.
"On travaille désormais pratiquement
sur les mêmes lignées mâles", précise à l'AFP l'éleveur et étalonnier
établi au Haras de Brullemail -d'où l'affixe Mail de ses produits-, dans
l'Orne.
Et de souligner: "Le holstein (un des nombreux
stud-books allemands) a amélioré sa race avec des étalons selle français
(SF) depuis les années 60. Désormais, ce sont des cousins. Ce qui fait
la différence, c'est l'environnement, le terroir sur lequel on élève, la
manière. En France, on a de l'espace. Les Néerlandais, les Belges ont
très peu de terrain. Leurs chevaux sont élevés en stabulation".
Quand
M. Le Courtois a débuté son activité, il y a 30 ans, les Français
refusaient encore d'ouvrir leur stud-book. Un combat d'arrière-garde.
Pendant ce temps, les chefs de race SF -Cor de la Bryère, Almé, Quidam
de Revel, Quick Star- amendaient les élevages allemands et belges, déjà
affirmés, et aidaient le néerlandais KWPN à se hisser au sommet.
Dans les années 60, il était encore possible pour le néophypte de
deviner les nationalités du cheval et de son cavalier à la morphologie
et au style de monte. "les chevaux allemands étaient massifs. Désormais,
ll y a globalisation du modèle. Ce sont des beaux chevaux modernes,
plaisants, dans le sang. Et les cavaliers se sont affinés, avec une
équitation assez similaire", remarque M. Le Courtois.
"Les grands
éleveurs normands (de chevaux de sport) des années 60-80 étaient pour
la plupart des autodidactes. Sur le plan économique, tout était plus
facile aussi", constate l'ex-président de l'ANSF. De fait, si l'élevage
hexagonal continue de produire des cracks, "la France n'a pas de culture
commerciale en la matière, et c'est notre grand drame", constate le
naisseur.
Les marchands belges, néerlandais et allemands
régentent ce commerce juteux, réalisant de belles plus-values avec
l'intérêt croissant des monarchies du Golfe pour le CSO.
M. Le
Courtois est confronté régulièrement à la catégorie des nouveaux
éleveurs, propriétaires pour la plupart d'une seule poulinière et
"sensibles aux effets de mode, au marketing et à la publicité". "Ils
voient un cheval qui gagne et ils se disent: +Je veux ce cheval-là pour
ma jument+. La bonne question est: +Cet étalon convient-il à ma
jument?+. Et puis tout le monde rêve d'avoir un cheval olympique mais
tous n'ont pas le cheptel pour ça."
Des étalons en vogue couvrent
annuellement 600 juments par an (semence congelée ou semi-fraîche), au
détriment de "la diversité génétique, car on a énormément d'étalons qui
ne sont pas testés", regrette l'éleveur ornais.
Stationné près de Boulogne-sur-Mer (Pas-de-Calais), pour drainer
la clientèle du Bénélux, Kannan (KWPN) est le père d'un millier de
poulains chaque année, dont la moitié en France. "Almé, dont j'ai été le
dernier propriétaire et qui est mort à 25 ans, n'a fait dans toute sa
carrière que 280 poulains en France", rappelle M. Le Courtois.
"On
va vers des chevaux à la mode, plus +flashy+, parce qu'on peut essayer
de vendre le poulain très rapidement et faire un coup (financier). Alors
que notre lignée Almé-Baloubet-Quick Star est formidable".
Initiative
pour valoriser l'excellence française en matière de chevaux de sport
-selle français et anglo-arabe -, Saint-Lô (Manche) accueille ce
vendredi le Normandy Horse Show, avec plusieurs ventes organisées au
long de la journée.
Et puis le partenariat signé mardi entre la fédération française d'équitation (FFE) et son homologue chinoise ouvre d'intéressantes perspectives aux éleveurs hexagonaux.
(AFP)
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