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lundi 30 mars 2015

Faute de moyens, l'équipe de basket de Saint-Sever (D1 féminine) doit quitter son village pour la ville

Saint-Sever, petite ville des Landes de 4 950 habitants, va perdre ses filles de Basket Landes qui brillent en Ligue féminine au point de devoir déménager à Mont-de-Marsan.
[...] À Saint-Sever, bourgade de 4 950 habitants, on constate avec fierté que les filles de Basket Landes représentent l’une des plus petites municipalités dans le classement du Championnat « L’ÉQUIPE » des villes. Dans cette partie des Landes, le bonheur engendré par le bon comportement du club, actuel 4e de la Ligue féminine, n’est pourtant pas total. Car la saison prochaine, Basket Landes s’installera définitivement, à 15 km de là, à Mont-de-Marsan (2 500 places), où se jouent déjà les grosses affiches de Championnat et les matches d’Eurocoupe. Hier soir, les joueuses s’y sont inclinées contre le leader Bourges (50-65) mais ont tout de même effectué un tour d’honneur.

Émanation du club d’Eyres-Moncube, un village limitrophe de Saint-Sever, l’équipe féminine, présente en LFB depuis 2008, et sa salle de Laloubère (966 places) sont considérées comme un patrimoine de la ville. Avec un budget de 1,4 M€ – quand Bourges et Lattes-Montpellier affichent respectivement 2,9 M€ et 2,1 M€ –, dirigeants et joueuses font des miracles. La saison dernière, Basket Landes s’est ainsi hissé jusqu’aux demi-finales du Championnat. Dans son bureau de l’hôtel de ville, Arnaud Tauzin (UMP) apprécie. « Ici, c’est un fief du basket. ll y a toujours eu cet esprit “village”, du petit qui bat les gros », sourit celui qui a accédé à la mairie au printemps 2014, après vingt-cinq ans de mandature socialiste.

Élu au terme d’une campagne notamment axée sur son opposition au projet de création d’une nouvelle salle d’une capacité de 2 400 places, le premier magistrat n’est guère populaire dans l’entourage du club. «  C’est le sujet sur lequel s’est faite l’élection  », reconnaît-il. En décembre, la communauté de communes « Cap de Gascogne » a définitivement voté contre ce projet. D’où le déménagement obligatoire de Basket Landes, à qui la LFB octroyait depuis sept saisons une dérogation d’homologation de Laloubère. «  Le cordon avec Saint-Sever va être coupé de fait, acte M. Tauzin. Comme l’Élan Béarnais a su couper le cordon avec Orthez, il y a quelques années. Le sport pro, ce n’est pas dans nos cordes.   »

Ils n’iront donc plus à Laloubère, qui accueillera l’équipe pour la dernière fois le 1er avril à l’occasion de la venue de Charleville. Et ça, ça leur fend le cœur comme on a pu le constater le 28 février pour le dernier derby de l’Adour, Basket Landes-Tarbes, joué à Saint-Sever. Une supportrice : « Et le maire, il n’est pas venu ? Il ne vaut mieux pas... »

«  C’est une vitrine que l’on casse, regrettait Alex, cogérant de la brasserie La Muleta, sise sur la place du Tour-du-Sol, en cœur de ville. Et un coup dur porté aux commerces. Le basket, c’est Saint-Sever ! Mont-de-Marsan, c’est le rugby ! Là-bas, ça ne sera plus pareil.  » La pilule est amère pour ce public issu des villages du canton. Une grande fratrie qui ne se sent chez elle qu’à la bruyante mais familiale Laloubère. Là où l’on fredonne et chante au rythme des bandas. Où les enfants courent et glissent sur le parquet, frôlant les joueuses avec plaisir en marge de l’échauffement et du match. Où les héroïnes du département claquent la bise aux spectateurs et spectatrices et où chacun s’appelle par son prénom. Où l’on est serrés et unis. De mauvaise foi, voire virulents avec les arbitres. Mais toujours connaisseurs de ce jeu. «  Et le maire , il n’est pas venu ? interrogeait ironiquement une mère de famille. Il ne vaut mieux pas…  » On dit qu’à l’occasion du match précédent, contre Calais, l’édile eut droit à une bronca. Et que, pour la venue de Tarbes, la présence d’une équipe de Stade 2 le dissuada de venir. Ce soir-là, Basket Landes s’inclina (54-69). Et à la réception d’après-match, Pierre Dartiguelongue, le coprésident, adressa un message limpide à son staff et aux joueuses : «  La pression, vous l’avez, je vous la mets. Il faut une demi-finale. C’est indispensable pour le développement du club, sportivement et financièrement. »

Alors, il a fallu surmonter la querelle de village. Non sans émotion. «  Vu ce qu’on a réussi à faire avec nos moyens modestes, ça aurait été fabuleux d’avoir notre propre salle et de rester ici, sourit Marion Laborde, l’enfant du pays, ex-membre des Braqueuses aux JO de Londres, en 2012. Laloubère, c’est un chaudron. Comme si on jouait à 6 contre 5…  » Dartiguelongue ne nie pas que l’atmosphère a été pesante, ces derniers mois, autour d’un dossier très politisé. «  Ç’a été une saison insupportable. Il a fallu garder le groupe à l’écart de tout ça et préserver l’aspect sportif.  » Et réagir. Anticiper : «  Le club doit continuer à grandir. On part pour une nouvelle destination, un nouveau toit, et on doit envisager de nouveaux partenariats aussi. C’est un enjeu important . »

L’évolution sportive du club, qui vise l’accession à l’Euroligue d’ici à trois ans, sera liée à son essor économique, à sa capacité à développer ses recettes billetterie, à trouver de nouvelles ressources. «  L’objectif prioritaire c’est d’être dans les six, puisqu’il y a une nécessité de disputer la Coupe d’Europe pour garder le même niveau de partenariat économique, approuve Olivier Lafargue, l’entraîneur, par ailleurs assistant-coach de l’équipe de France féminine. Mais, avec les filles, notre ambition, c’est de revenir en demi-finales, mi-avril. » En Chalosse, on n’a pas peur d’exprimer ses rêves. «  Champion de France tout court ? Oui, c’est fou, conclut le technicien. Mais c’est quelque chose que l’on ne veut pas écarter non plus…  » À Saint-Sever... ou ailleurs.

(L'Equipe)

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