jeudi 2 février 2017

A Budapest, la candidature aux JO-2024 cristallise les mécontentements

 Outsider de la course aux JO-2024, la candidature de Budapest est menacée dans la dernière ligne droite: un jeune collectif, aussi hostile à l'événement qu'au gouvernement de Viktor Orban, se dépense sans compter pour arracher la tenue d'un référendum anti-Jeux.
Alors que Los Angeles et Paris, les deux favoris, se lancent vendredi dans la promotion internationale de leur destination, Budapest doit faire profil bas et mettre toute ses forces dans la conquête de l'opinion publique hongroise.
L'enthousiasme du Petit poucet, qui veut miser sur sa fraîcheur et son envie pour rivaliser avec les deux mégalopoles, s'est assombri depuis qu'un groupe d'activistes, regroupés dans le mouvement "Momentum", a lancé une campagne de signatures dans le but d'organiser un référendum contre la candidature.
La campagne a démarré en trombe: lancée le 19 janvier, elle a permis de collecter, selon les organisateurs, 70.000 soutiens en dix jours.
Les opposants espèrent, dans les quinze jours qu'il leur reste, rassembler 200.000 signatures dans la capitale pour mettre toutes les chances de leur côté, puisque le seuil légal pour obtenir une consultation populaire locale est fixé à 138.000 soutiens.
"Cette candidature cristallise les préoccupations des Hongrois sur la corruption, le sentiment que l'argent des contribuables est dépensé dans la construction de stades plutôt que d'hôpitaux et d'écoles", explique Andras Fekete-Gyor, le jeune meneur, âgé de 27 ans, de la campagne "Nolimpia".
Momentum rassemble principalement une génération de vingtenaires et trentenaires désenchantés, qui se sentent "abandonnés, sans savoir pour qui voter", selon Andras Fekete-Gyor. Mais le mouvement ambitionne de fédérer plus largement tous les mécontents de la politique menée par M. Orban.
Face à des hommes politiques "qui ont perdu la confiance des citoyens", vingt-sept ans après la fin du communisme, "nous devons recréer cette confiance en agissant, pas en parlant", estime M. Fekete-Gyor.
Zoltan Erdos, un urbaniste de 37 ans qui compte parmi les bénévoles, ne croit pas que les coûts des JO à Budapest puissent être gérés "de manière transparente".

Le spectre de la corruption

Alors que la Hongrie joue la carte de Jeux moins coûteux, plus modestes que ses rivales, Momentum estime par avance que les dépassements et la corruption doubleront le budget d'investissements de 2,4 milliards d'euros prévu.
Mais les partisans du référendum se recrutent dans toutes les classes d'âge. "La Hongrie ne peut pas s'offrir ces Jeux", estime Eszter Garay, 54 ans, après avoir signé la pétition.
Si plusieurs indicateurs économiques sont au beau fixe, comme un taux de chômage au plus bas depuis la fin du communisme et une croissance économique régulière, les faibles salaires poussent beaucoup de Hongrois à s'expatrier et le niveau des services publics, notamment en matière de santé, laisse à désirer.
Dans un paysage politique où l'opposition peine à exister face au gouvernement Orban en place depuis 2010, Momentum n'exclut pas de se transformer en force politique, en vue des législatives de 2018.
Officiellement, le comité de la candidature hongroise ne change rien à ses plans et se dit convaincu, dans un mail à l'AFP, que Budapest-2024 "bénéficie d'un large soutien publique et politique".
Plus nerveux, le maire conservateur de Budapest, Istvan Tarlos, a appelé "ceux qui aiment Budapest" à ne pas signer. Le qualificatif de "traîtres" a été lancé par un commentateur proche du gouvernement à l'encontre des signataires.
Selon un sondage publié mercredi, la majorité (68%) des 600 personnes interrogées sont contre la candidature de Budapest et souhaitent la tenue d'un référendum (60%).
Même l'ancien entraîneur star de l'équipe nationale de water-polo, triple médaillée d'or olympique, Denes Kemeny, dont le visage fait la promotion de Budapest-2024 sur de nombreux panneaux de la capitale, a reconnu que l'organisation d'un tel suffrage était "légitime".
Déjà en lice à cinq reprises, la Hongrie a vu toutes ses candidatures échouer: Moscou est à ce jour la seule ville de l'est de l'Europe a avoir décroché l'organisation des JO d'été, en 1980.
Un référendum, dont l'issue est incertaine, se tiendrait au plus tôt en mai. Le nom de la ville-hôte des JO-2024 sera dévoilé le 13 septembre à Lima par le Comité international olympique (CIO).

(AFP)

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Journaliste spécialisé dans l'actualité sportive, j'ai collaboré, entre autres, à So Foot, Libération, Radio France Internationale. Aujourd'hui, je suis particulièrement les politiques sportives au plan national et dans les collectivités locales pour Localtis.