L'information est parue sous la forme d'une simple brève dans le
quotidien L'Equipe du 11 juillet mais elle suscite un vif émoi : en cas
de dépôt de bilan du Mans FC, club de football de Ligue 2 rétrogradé au
niveau amateur régional (division d'honneur) après de graves péripéties
financières et sportives, le concessionnaire du MMArena, stade
ultramoderne de 25.000 places inauguré en 2011, serait en droit de
réclamer aux collectivités concédantes 44 millions d'euros d'indemnités,
soit 1.717 euros par habitant. Cet exemple illustre une fois de plus
les difficultés, parfois insurmontables, qui existent au sein des
collectivités pour accompagner le développement des clubs sportifs
professionnels, notamment en finançant la construction de grands
équipements. "Est-ce au contribuable de financer l'aléa sportif ?",
s'est demandé Pierre Léautey, député de Seine-Maritime, lors de la
discussion qui a suivi, mercredi 10 juillet, la remise du rapport des
députés Guénhaël Huet et Régis Juanico consacré à la politique de
soutien au sport professionnel et aux solidarités avec le sport amateur.
Un rapport présenté une semaine tout juste après celui portant sur le
fair-play financier européen et son application au modèle économique des
clubs de football professionnel français, de Thierry Braillard,
Marie-George Buffet, Pascal Deguilhem et Guénhaël Huet. Deux textes
"complémentaires", comme l'ont souligné les membres de la commission des
affaires culturelles de l'Assemblée nationale, qui soulignent l'un et
l'autre la nécessité de redéfinir les relations entre collectivités et
clubs professionnels.
La moitié des ligues professionnelles majoritairement financées par de l'argent public
Les subventions publiques aux clubs de football sont en nette
diminution. Pour la Ligue 1, elles ont diminué de 28% en cinq ans pour
s’établir 18,5 millions d’euros en 2011/2012, soit 1,1% du total des
produits hors transferts de joueurs. "L’érosion des subventions des
collectivités tend donc à fragiliser leur situation, tandis qu’elle
empêche ces dernières d’exercer un droit de regard plus exigeant sur le
budget des clubs", écrivent les auteurs du rapport sur le fair-play
financier. Mais ce qui est vrai pour le football ne l'est pas dans
d'autres disciplines. Ainsi, pour six des treize ligues ou divisions
professionnelles recensées en France, les subventions publiques
constituent encore plus de la moitié des recettes enregistrées lors de
la saison 2011/12. La palme revenant à la ligue B de volley-ball
masculine (79%), alors que les trois ligues professionnelles féminines
(basket-ball, volley-ball et handball) tirent toutes la majorité de
leurs recettes de subventions publiques. "La mission montre à quel point
les modèles économiques, les modes de gestion, le potentiel de
ressources sont variables d’une discipline à l’autre, mais aussi d’une
division à l’autre au sein d’un même sport. Cette diversité appelle de
notre part des réponses adaptées et différenciées", a commenté Valérie
Fourneyron, ministre des Sports.
Au chapitre des réponses, et pour ce qui concerne le football, les
rapporteurs sur le fair-play financier demandent "que seules les
dépenses relatives à la formation et l’insertion des jeunes sportifs
accueillis dans les centres de formation puissent désormais faire
l’objet de subventions des collectivités locales au titre des missions
d’intérêt général". La participation du club à des actions d’éducation,
d’intégration ou de cohésion sociale ou la mise en oeuvre d’actions
visant à améliorer la sécurité du public et à la prévention de la
violence dans les stades, aujourd'hui prévues par le Code du sport,
étant donc écartées par la proposition.
Des équipements trop chers pour les clubsSi l'argent public se fait plus rare dans les budgets des clubs des
grandes ligues professionnelles (football et rugby), il est toutefois
largement présent à travers les investissements dans les équipements,
propriétés des collectivités à 95%. La privatisation de stades – à
travers le financement de la construction ou le rachat à une
collectivité – est souhaitée par de nombreux acteurs. Mais si, comme
l'écrivent les rapporteurs sur le fair-play financier, "la perspective
d’une propriété des enceintes par les clubs est évidemment séduisante au
regard de l’objectif de maîtrise de l’exploitation de l’infrastructure
par le club, […] elle soulève plusieurs objections" : coûts prohibitifs
pour la plupart des clubs, difficulté à rentabiliser un stade avec les
seuls matchs, difficulté à moderniser et aménager certaine enceintes
existantes, etc. Les partenariats public-privé étant pour leur part
jugés coûteux et hasardeux, les rapporteurs recommandent de "confier
l’exploitation des stades aux clubs par tous moyens juridiques adéquats"
et d'"engager la réflexion sur la possibilité de conclure, entre les
clubs et les collectivités locales, des conventions s’inspirant des baux
commerciaux et incluant des clauses-types qui garantiraient un droit de
regard des collectivités sur l’utilisation sportive des
infrastructures".
Entre les subventions directes parfois importantes et la nécessité quasi
absolue de financer les équipements, le "rôle des collectivités
territoriales […] est majeur pour le sport professionnel", a reconnu
Valérie Fourneyron, pour qui "la situation financière des structures
professionnelles, sans être partout préoccupante, est fragile".
Partisane d'une plus grande autonomisation du sport professionnel, la
ministre a conclu la présentation de Guénhaël Huet et Régis Juanico en
déclarant : "Le traitement du sport professionnel comme une activité
économique identique aux autres, qui doit assurer son autosubsistance
par sa seule activité, est encore loin de nous." Le sujet devrait
toutefois trouver une traduction dans le projet de loi d’orientation
pour le sport attendu en 2014.
(Source : Localtis)
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