S’il suscite encore des remous, l’accord financier
trouvé le mois dernier avec la Ligue, qui permet
à l’ASM de conserver son siège à Monaco,
est le résultat de négociations
menées en coulisse par des intermédiaires.
LE PROCÈS-VERBAL du conseil
d’administration (CA) de la Ligue
de football professionnel (LFP) du
23 janvier est formel : les clubs qui
participent au Championnat doivent
résider en France, «à l’exception de l’AS Monaco FC,
dont le
siège de direction effective est situé
sur le territoire de la Principauté
de Monaco». En échange
de ce passe-droit, le club monégasque
s’engage à verser, une
fois pour toutes, 50 M € à la Ligue
pour compenser ses avantages
fiscaux et sociaux. Mais pour
conclure cet «armistice», il a fallu
en passer par des tractations
souterraines entre les deux
camps.
Tout commence le
21mars 2013, avec la décision de
la LFP d’obliger tous les clubs à
avoir leur siège en France.
L’AS Monaco riposte, le
17mai 2013, en engageant un recours
devant le Conseil d’État
pour «excès de pouvoir». Les
deux parties s’ignorent alors pendant
des mois, avant d’engager
des discussions en novembre
dernier. Elles passent par deux intermédiaires,
amis dans la vie :
Jean-Michel Roussier, ancien président
de l’OM (1995-1999),
membre du conseil d’administration de
la Ligue, et Willy de Bruyn,
administrateur de l’ASM, qui officie
pour le club et le gouvernement monégasques.
De multiples
rencontres ont lieu, mais sans résultat
tangible. Monaco propose
simplement de s’engager à recruter
des joueurs français, sans
plus de détails. La Ligue refuse
«cette porte ouverte».
Entre-temps, Monaco entame
une intense action de lobbying.
Après un passage à l’UCPF, le
syndicat des clubs, le 12 septembre,
Vadim Vasilyev, le vice-président
de l’ASM, et Willy de Bruyn
s’invitent, le 14 novembre, au CA
de la LFP.
Aidés d’un document qu’ils font
circuler, ils vantent les bienfaits
actuels et futurs de la participation de
leur club au Championnat
de France : «La future renégociation des
droits télé domestiques
en 2016, les droits internationaux
de la L1, l’amélioration de l’indice
UEFA, les prêts de joueurs, le
remplissage de stades, la venue
de nouveaux sponsors et de nouveaux
investisseurs.» Avant de
rappeler qu’il est de toute façon
exclu pour eux «d’obtempérer et
de transférer le siège du club en
France».
Les membres du CA de
la LFP mesurent la détermination
de Dimitri Rybolovlev, le milliardaire russe qui possède
et préside
l’ASM.
Dès lors, Frédéric Thiriez, proche
du prince Albert, s’implique dans
la négociation en informant les
autorités françaises de ses démarches.
Qui aboutissent, le
8 janvier, à un accord oral entre le
président de la LFP et son homologue monégasque.
Il ne reste plus qu’à convaincre
les dirigeants de club, tenus dans
l’ignorance de l’avancée d’un
dossier ultrasensible.
«Dans une
telle affaire, si vous réunissez tout
le monde, il y a forcément des
fuites qui vont faire capoter l’accord
», estime Thiriez. Le bureau,
puis le CA de la LFP valident la
transaction. Ce qui n’empêche
pas les critiques. «Un compromis fait forcément
des insatisfaits, plaide
Thiriez. Il y en a du côté des clubs,
mais aussi de Monaco. Cela
prouve qu’il s’agit d’un bon accord.
Moi aussi, j’aurais voulu davantage
(d’argent). Mais il ne faut
pas oublier que Monaco participe
au Championnat de France depuis
quatre–vingts ans sans
aucune contrepartie financière.»
Reste à savoir si certains peuvent
aller au-delà des critiques et attaquer
la décision de la Ligue devant
les tribunaux. «S’il y a une
menace d’annulation de notre
décision, les commissaires aux
comptes vont nous forcer à mettre
les 50 M € de Monaco en provision
et on ne pourra donc pas
disposer de cet argent, prévient
Thiriez. Cela revient donc à se tirer
une balle dans le pied. Si des
clubs saisissent le Conseil d’État,
c’est leur droit. Mais ils devront
en assumer la responsabilité.»
(L'Equipe)
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