L'homme d'affaires britannique Bernie Ecclestone, dont le procès pour
corruption s'ouvre jeudi à Munich, est un petit bonhomme qui règne
toujours, du haut de son 1,60 m et à 83 ans, sur un empire
économico-sportif pesant plusieurs milliards d'euros, la Formule 1.
Depuis
quelques jours, c'est la responsable australienne de son service
juridique à Formula One Management (FOM), Sacha Woodward-Hill, 44 ans,
qui expédie les affaires courantes. Car "Bernie" va devoir se
concentrer, avec ses avocats, sur la vingtaine d'audiences prévues
jusqu'en septembre, à raison de deux par semaine en moyenne.
Ce
passage de témoin, qui plus est à une femme, c'est déjà un début de
transition en F1. Car "Bernie" sait tout, dirige tout et décide tout
depuis les années 80, quand il a signé avec son grand ami Max Mosley,
alors président de la Fédération internationale du sport automobile
(FIA), un accord lui garantissant les droits commerciaux de la F1 pour
plus d'un siècle.
C'est ce contrat du siècle, au sens propre, qui a
donné à "Mr E" l'essentiel de son pouvoir, surtout sur les écuries de
F1 dans lesquelles il a permis de créer des milliers d'emplois. Et les
patrons d'écurie sont payés comme des ministres pour animer le plus
grand cirque du monde, un Barnum mécanique qui fait étape une vingtaine
de fois par an aux quatre coins de la planète.
"Pour être honnête, la F1 est ce qu'elle est grâce à Bernie
Ecclestone, à la manière dont il a construit ce sport depuis 35 ans.
Tout ce que nous voyons ici est basé sur ce qu'il a fait, et réussi.
Sans lui nous aurions de gros soucis", disait à Silverstone, l'an
dernier, son compatriote Christian Horner, Team Principal de Red Bull
Racing.
Ecclestone a amassé sa fortune personnelle (deux à quatre
milliards d'euros, selon les estimations) en augmentant la valeur du
produit F1, à partir de deux lois sacro-saintes du monde des affaires:
l'offre et la demande, car l'ex-vendeur de voitures d'occasion est féru
d'économie, et la confidentialité.
Excellent vendeur, Ecclestone a
toujours trouvé, bon an mal an, des acheteurs pour son plateau de F1
(une vingtaine de voitures et pilotes), ses droits de télévision dans
plus de 150 pays, ses panneaux publicitaires sur les circuits, ou ses
tickets VIP pour le Paddock Club, une vraie mine d'or: 600 à 6.000
invités haut de gamme par Grand Prix, à 2.500 euros par tête.
Avec
sa chemise blanche assortie à ses cheveux, il a espacé ses passages
dans le paddock de F1 depuis le début de ses premiers soucis
judiciaires, mais il "aime toujours autant signer des contrats", dit-il.
Sauf que le conseil d'administration de Delta Topco, la holding de la F1, lui a retiré
cette prérogative. Alors il continue à les négocier, dans l'ombre,
forcément.
Car il se trouve toujours un pays qui souhaite augmenter son
exposition médiatique en organisant un Grand Prix, en Asie par
exemple... Un milliardaire qui aimerait se changer les idées et claquer
sa fortune en gérant une écurie de F1 plutôt qu'un club de football,
comme l'Américain Gene Haas... Une entreprise qui souhaite améliorer son
image ou "booster" sa notoriété, comme Rolex ou Singapore Airlines
récemment, en misant sur la F1.
Du coup, la loi de l'offre et la
demande est toujours respectée, même si c'est plus compliqué depuis la
crise financière de 2008. Et il y a toujours une solution pour "Mr E".
Alors il continue à produire de la richesse pour ses amis, comme un
Midas des temps modernes, en tirant les ficelles d'un sport qui fait
rêver des millions de gens depuis les années 60.
Le procès qui
s'ouvre jeudi à Munich va être compliqué pour "Bernie", car la justice
allemande n'a pas l'habitude d'offrir un traitement de faveur aux
vedettes du sport, elle qui a ruiné le tennisman Boris Becker et vient
d'envoyer en prison Uli Hoeness, le président du Bayern Munich.
La
grande question que tout le monde se pose, dans les paddocks de F1,
c'est: "Comment donc ce diable de Bernie va réussir à s'en sortir?". Il
cherche une solution, avec ses avocats.
(AFP)
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