vendredi 19 septembre 2014

JO-2016 - Menace sur le futur golf olympique de Rio pas très écolo

Du gazon et 18 trous à la place de la forêt tropicale et des caïmans ? Le futur golf olympique de Rio de Janeiro est au coeur d'une bataille judiciaire qui pourrait paralyser son chantier.

Un juge de Rio a accordé mercredi un délai de 45 jours à la municipalité et à l'entreprise Fiori, qui construit le futur parcours olympique, pour qu'elles puissent soumettre un projet réduisant l'impact environnemental des travaux, déjà réalisés à 60%.
A l'audience, le juge Eduardo Klausner s'est manifesté pour une solution de compromis: respect des "engagements olympiques" certes, mais sans nuisance excessive à l'environnement.
Lorsque, en 2009, Rio de Janeiro a été élue ville hôte des jeux Olympiques d'été 2016, le Comité international olympique (CIO) a décidé d'inclure le golf au menu des disciplines, pour la première fois depuis les éditions 1900 et 1904. Un paradoxe dans cette ville où le football est roi et le golf un sport pour riches largement méconnu des Cariocas.
Rio de Janeiro comptait déjà deux parcours de golf privés. Mais le Comité d'organisation local (COL) et la Fédération internationale de golf (FIG) ont estimé qu'ils ne présentaient pas "les conditions adéquates" pour un parcours olympique, selon le porte-parole de l'Entreprise olympique municipale (EOM).
Il fallait donc construire un nouveau parcours, d'une superficie de 58.400 m2, qui deviendrait public après les JO, dans l'espoir de "populariser ce sport" à Rio.
Mais où ? Les organisateurs ont logiquement jeté leur dévolu sur un terrain proche de la future Cité olympique, dans le quartier de Barra da Tijuca, l'extension moderne de Rio de Janeiro.
Seul hic: ce terrain privé est situé à côté de la lagune de Marapendi, un écosystème ravagé par l'activité minière il y a des décennies mais déclaré par la suite zone protégée. La forêt tropicale atlantique y a repoussé. Et peu à peu le site est redevenu un paradis pour les caïmans, les caypibaras -le plus gros rongeur de la planète- et de nombreux oiseaux.
Sauf que depuis le début des travaux, les constructeurs du golf ont allègrement taillé dans la forêt, menaçant tout cet écosystème renaissant, au grand dam des écologistes.
L'entreprise Fiori, propriétaire du terrain et chargée de construire le nouveau parcours pour un coût évalué à 60 millions de réais (19,6 millions d'euros), prévoit en outre d'édifier aux alentours de luxueux immeubles d'habitation de 20 étages chacun.
Pour accorder le label-vert nécessaire à l'autorisation du chantier, la mairie de Rio s'est livrée à un tour de passe-passe: elle a fait modifier le texte encadrant les critères de préservation de la zone.
Il a suffi de modifier un mot: la "zone de préservation de la vie sylvestre" initiale, qui interdisait formellement toute intervention humaine, est devenue une simple "zone de préservation", avec des critères beaucoup plus souples, a expliqué à l'AFP l'ingénieure forestière Isabel Lobato. En total désaccord, elle a démissionné en février de son poste de coordinatrice pour la conservation et la protection environnementale du secrétariat de Rio à l'Environnement.
"Le seul fait de planter du gazon n'aide pas à l'objectif de conservation de la vie sylvestre parce que cela empêche tout processus de récupération", dénonce Mme Lobato.
Au début de la bataille judiciaire, le parquet de Rio avait demandé la suspension du permis environnemental, en dénonçant les dommages causés. Il avait aussi pointé des erreurs dans le processus ayant débouché sur l'octroi du label-vert du golf olympique.
Mais lors des dernières audiences, il s'est finalement prononcé en faveur de la poursuite des travaux, sauf dans une frange de forêt tropicale large de 400 mètres située à l'extrémité du parcours.
Le respect de ces nouveaux paramètres affecterait au minimum cinq des dix-huit trous du parcours initial dessiné par l'Américain Guy Hanse. Ce qui rendrait "impossible" l'achèvement des travaux à temps pour les JO, font valoir les avocats de l'entreprise Fiori.
La mairie de Rio, qui n'a pas autorisé l'AFP à visiter le chantier, se déclare quant à elle disposée à étudier toute modification du projet. Mais pas avant les JO.
Les travaux, qui ont débuté avec un an de retard, devraient être achevés avant un test prévu mi-2015. Le gazon a commencé à être planté en août. Et 60 golfeurs de 30 pays sont attendus en 2016 à Rio.

(AFP)

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Journaliste spécialisé dans l'actualité sportive, j'ai collaboré, entre autres, à So Foot, Libération, Radio France Internationale. Aujourd'hui, je suis particulièrement les politiques sportives au plan national et dans les collectivités locales pour Localtis.