Par temps clair, les skieurs au sommet de la plus haute station
d'Afrique du Nord, Oukaïmeden, à 3.600 m d'altitude, dans le sud
marocain, pourraient presque apercevoir les premières dunes du Sahara.
La
vue sur la plaine de Ouarzazate, la porte du désert, est
impressionnante, mais le manque d'infrastructures empêche Oukaïmeden,
posée au pied d'un des principaux massifs du Haut-Atlas, de rivaliser
avec les stations de sports d'hiver des Alpes.
A 50 kilomètres des
riads et piscines de luxe de Marrakech, la plus connue des destinations
du royaume, Oukaïmeden ne manque pas d'exotisme. Cet hiver, plusieurs
dizaines de centimètres de neige ont durablement recouvert ses 18
pistes, une première depuis près de 20 ans, selon les habitués.
"Nous sommes au sommet, tout près des nuages. C'est magnifique!", s'extasie Joumaïna, une touriste britannique.
Oukaïmeden,
une des deux seules stations de sports d'hiver du royaume avec Ifrane
(Moyen-Atlas), offre aux skieurs quelque 1.000 mètres de dénivelé.
"Il
manque encore des infrastructures pour soutenir la comparaison avec
l'Europe", reconnaît toutefois Mohamed Bennani, moniteur de ski au sein
de la fédération royale marocaine de ski et de montagne (FRMSM).
Les
récentes chutes de neige ont entraîné, d'après des responsables locaux,
des records d'affluence, avec jusqu'à 30.000 visiteurs par jour lors
des premiers week-ends de l'année.
Mais, faute d'infrastructures
pour les accueillir, "les gens viennent puis repartent le soir, un peu
comme on va à la plage" l'été du côté de Rabat ou Casablanca, déplore M.
Bennani.
A ce jour, seulement trois auberges, dont une tenue par
des Français d'une capacité de quinze lits, et quelques rares chalets
offrent une possibilité de logement pour la nuit.
Tandis que
plusieurs dizaines d'enfants s'essaient au chasse-neige, Bouzekri Attifi
juge également vital cet effort de modernisation.
Ayant quitté
Marrakech à l'aube avec une cinquantaine d'élèves de l'école privée
qu'il dirige, il a sollicité un refuge auprès de la fédération "afin de permettre aux enfants de prendre leur petit-déjeuner avant de se lancer sur les pistes", explique-t-il.
Parmi les autres freins au développement figurent les conditions
d'accès à la station. Quand l'affluence avoisine les 5.000 véhicules en
week-end, la circulation peut en effet virer au cauchemar et nombre de
visiteurs renoncent.
"La route est trop petite (...) et peut
parfois être coupée quatre-cinq jours" du fait des chutes de neige,
commente Hassan Azougagh, un autre moniteur.
Pour tenter de
résoudre ce problème, les autorités de la province d'El Haouz, dont
dépend Oukaïmeden, ont aménagé plusieurs parkings pour voitures et une
station pour autocars. Une nouvelle route régionale a été ouverte.
Les
seuls efforts de l'Etat ne sont pas suffisants pour pallier ces
problèmes d'infrastructures et ne sont pas pour l'heure accompagnés
d'investissements privés notables. Le seul grand projet, annoncé il y a
plus de huit ans d'un montant de 1,4 milliards de dollars par le groupe
émirati Emaar, est en stand by. Le groupe ne communique plus sur cet
investissement.
Ce faisant, Oukaïmeden peut-elle devenir une
destination de choix pour le tourisme marocain, secteur vital pour
l'économie du royaume qui ambitionne de doubler le nombre de visiteurs
--de 10 à 20 millions-- d'ici 2020 ?
Si les sports d'hiver, avec
la location de matériels et les leçons de ski, assurent une bonne part
des revenus du bourg en hiver, le chiffre d'affaires de la station, de
novembre à mars, reste modeste et dépend de l'enneigement.
Conscient
de ses limites, Oukaïmeden s'efforce ainsi d'attirer parallèlement les
randonneurs désireux d'en découdre avec les sommets à plus de 4.000
mètres, dont le célèbre Toubkal.
Avec le parapente ou encore le
deltaplane, ce tourisme vert présente l'avantage de saisons plus
longues, dont la période estivale, lorsque la température frôle les 45
degrés dans la plaine de Marrakech.
"Toutes les nationalités
viennent déjà ici, des Français, des Anglais... Vraiment de tout. Nous
accueillons aussi beaucoup de Marocains", argue pour sa part Brahim
Chah, lui aussi moniteur de ski.
Venu de Grande-Bretagne pour
admirer l'incroyable panorama, Steve se dit conquis. "Je n'avais jamais
skié auparavant, mais ici les conditions sont vraiment idéales pour
débuter", juge-t-il.
(AFP)
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