Si la "French Touch" d'Air et Daft Punk s'exporte de longue date aux Etats-Unis, la "French Formation" prodiguée par la fédération française de football (FFF) fait elle aussi, quoique plus récemment, le
bonheur de l'ambitieuse Major League Soccer (MLS), le championnat
américain de football.
"Et voilà! T'as rien écouté, maintenant on
doit tout réexpliquer", tempête Jean-Claude Lafargue, directeur de
l'Institut national de formation de Clairefontaine (INF). Son élève
joueur, le nez sur ses crampons fluos, se replace sur la pelouse.
Immédiatement,
un jeune homme d'une trentaine d'années, casque audio sur la tête au
bord du terrain, débite d'un ton monocorde dans son micro-cravate: "You
weren't listening, now we have to explain everything once again."
Dix-huit
formateurs de franchises de MLS suivent la scène attentivement, assis
dans l'herbe, avec dans les oreilles la traduction simultanée des
consignes et un calepin à la main.
Ils passent la semaine à Clairefontaine pour passer le brevet de formateur "à la française" auprès de la fédération
française de foot. Et après une heure de cours théorique sur les
systèmes de jeu, ils assistent à la mise en pratique par les formateurs
de l'INF.
Ces 18 stagiaires, représentants des Los Angeles Galaxy,
New York Red Bulls ou Toronto FC, composent la seconde promotion
d'élèves formateurs américains, venus passer l'exigeant diplôme dans le
cadre d'un partenariat FFF-MLS passé en 2013.
- 'Apprendre des meilleurs' -
"La MLS existe depuis 20 ans, mais la volonté de former des
jeunes joueurs est très neuve pour nous, explique Todd Durbin,
vice-président de la MLS. Il y a 5 ou 6 ans, nous avons réfléchi à ce
qu'il fallait faire pour se développer, nous avons voyagé pour trouver
des idées. Nous avons été très impressionnés par la FFF et leur travail
sur la formation."
"François Blaquart, le Directeur technique
national de la FFF me dit souvent: +si tu veux des bons joueurs, il faut
des bons entraîneurs, et si tu veux de bons entraîneurs il faut un bon
projet de formation+, expose encore Todd Durbin. Nous voulons faire de
nos coachs les meilleurs du monde et on avait besoin de savoir quoi
faire pour qu'ils le deviennent. Alors on essaie d'apprendre des
meilleurs".
La première session avait été organisée sur 18 mois,
la seconde sur 12. "On a dû adapter notre formation sur ces délais
resserrés et aussi sur les spécificités américaines", détaille
Jean-Claude Giuntini, en charge de cette formation.
"On a senti
qu'ils devaient progresser dans la prise en compte des étapes de
développement des jeunes et dans la répartition des charges et de
l'intensité des séances de travail", explique l'ancien sélectionneur de
l'équipe de France des moins de 17 ans qui a remporté l'Euro-2015.
- Objectif 2022 -
Les futurs directeurs de centre de formation, voire entraîneurs,
partaient-ils de zéro? "Non, ils avaient une base, une bonne base,
poursuit-il. Ils sont très attirés par la dimension statistique et
c'était assez simple de faire le lien. Mais il a fallu réaffirmer à quel
point la formation est une école de la patience, où il faut aussi être
attentif à ce qui est caché et pourra se révéler plus tard, via la mise
en confiance du joueur, l'apprentissage et la pédagogie."
La
première séance de cette seconde session de formation a lieu dans les
locaux idylliques et sous le soleil de Clairefontaine, pour le plus
grand plaisir de Todd Durbin - "ce doit être les plus beaux locaux
d'entraînement au monde!", s'enthousiasme-t-il sous les lustres du
château des "Bleus" - mais les suivantes seront organisées aux
Etats-Unis. "C'est une demande de leur part", explique M. Giuntini,
selon qui la prochaine aura lieu en novembre.
FFF et MLS se
refusent à évoquer le coût de ce partenariat. "Ce n'est pas qu'une
question financière", élude ainsi Todd Durbin, plus loquace quand il
s'agit d'évoquer l'ambition gargantuesque de la MLS: devenir l'une des
meilleures ligues du monde en 2022.
"On doit encore beaucoup
travailler pour devenir un des meilleurs championnats du monde,
notamment sur la formation. Notre objectif doit être de former le même
nombre de joueurs que ce que peut faire la France, expose-t-il. Si on
l'atteint, on pourra dire que la formation à l'Américaine aura trouvé sa
genèse ici, à Clairefontaine." Et qu'elle aura un peu l'accent
français.
(AFP)
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