Le "Non" de la population de Hambourg à la candidature olympique de
la ville ne changera pas la stratégie de Paris-2024: ses responsables
rejettent le principe d'un référendum, que réclament les opposants au
projet mais dont eux-mêmes se méfient.
Pas de consultation dans
les urnes, martèlent depuis sa naissance les patrons de la candidature
parisienne, Bernard Lapasset, Tony Estanguet et la maire Anne Hidalgo.
Ils l'ont répété après la claque reçue dimanche par le dossier allemand,
balayé par 51,7% des 650.000 votants. Revers qui laisse seulement
quatre villes en lice: Budapest, Los Angeles, Paris et Rome.
Ce
"Non" a plusieurs causes, selon les experts: craintes des débordements
financiers qu'engendre un tel événement, défiance vis-à-vis de sports
marqués par le dopage ou la corruption, ajoutés à un problème de
communication sur l'apport des Jeux.
"La décision a pu être
influencée par de regrettables incidents survenus en lien avec le dopage
et la corruption dans d’autres organisations sportives. C’est bien
dommage car le CIO lui-même veille à la transparence", a déploré le
président du Comité international olympique, Thomas Bach.
Les
référendums précoces dans un processus de candidature "ont toujours
montré une mobilisation plus importante des opposants que des
partisans", souligne Etienne Thobois, directeur général de Paris-2024,
qui rappelle que 65% des Hambourgeois étaient... favorables aux JO dans
le dernier sondage.
- "Pédagogie" -
Ensuite, poursuit-il,
"ce genre de projet génère des idées reçues et nécessite de la pédagogie
pour en démontrer les côtés vertueux". Thobois, un temps consultant
pour la candidature victorieuse de Tokyo-2020, se souvient ainsi que le
taux d'adhésion de la population est passé de 47 à 85% après maintes
opérations de concertation et d'explication du projet.
Pour
autant, le rejet de la candidature de Hambourg n'a pas manqué de
relancer le débat autour de la nécessité d'une consultation populaire.
Notamment chez les Verts qui avaient voté contre en Conseil de Paris, en
avril dernier.
"Est ce que c'est notre priorité de mettre de
l'argent dans des JO alors que le contexte de double attentat (7 janvier
et 13 novembre) nécessite que l'on investisse dans d'autres secteurs,
la politique de la ville, la réduction des inégalités, l'emploi...",
s'interroge David Belliard, coprésident du groupe écologiste de Paris,
auprès de l'AFP. "Pourquoi ne pas organiser un référendum comme cela se
fait dans toutes les grandes villes?"
Munich (en 2013) et Cracovie
(en 2014) ont renoncé aux JO-2022 à la suite d'une consultation
populaire. Oslo, malgré un référendum positif, Stockholm (JO-2022) puis
Boston (JO-2024) se sont retirées d'elles-mêmes en raison de craintes
liées au coût des Jeux.
"Les scandales de corruption à la Fifa et
de dopage dans l'athlétisme, le souvenir des coûts élevés des JO de
Sotchi, les attaques terroristes à Paris... tout cela a contribué à
créer un sentiment négatif", analyse Patrick Nally, l'un des "papes" du
marketing sportif, notamment auprès du CIO.
Globalement,
juge-t-il, "le sentiment général n'est pas à l'optimisme en Europe et
tout référendum olympique recevrait probablement aujourd'hui une réponse
négative".
A ce titre, Thomas Bach relève les "circonstances
très particulières et difficiles dans lesquelles le référendum s’est
déroulé" à Hambourg: il est intervenu "à un moment où l’Allemagne doit
faire face à un défi historique avec l'affluence d’un nombre extrêmement
élevé de réfugiés", ce qui "suscite des sentiments d’incertitude
largement partagés".
- "Question simpliste" -
"Il ne faut
pas réduire le sujet olympique à la question simpliste du +oui ou non+",
indiquait il y a quelques semaines le co-président du comité de
candidature parisien, Tony Estanguet. "Je ne suis pas forcément contre
l'idée d'un référendum mais (...) il faut aller plus loin et associer la
population au projet".
Faute de réelle consultation populaire,
Paris-2024 se prévaut donc d'une volonté de "concertation". La mairie de
Paris a créé un site dédié ("Pour 2024, faites vos Jeux") destiné à
recevoir les commentaires du public. Et le comité de candidature
s'apprête à lancer une plateforme participative censée permettre à la
population de "co-construire le projet" avec des associations,
écologistes, sportives, touristiques...
Idem à Rome, où un
référendum n'est pas non plus à l'ordre du jour. "Nous travaillons avec
toutes les municipalités voisines et tous les responsables pour faire
comprendre l'intérêt des Jeux", explique à l'AFP une source proche du
comité de candidature italien.
A défaut de référendum, la
popularité de la candidature parisienne sera étalonnée par un sondage
qui sera réalisé fin 2016 par le CIO, avant le vote final de l'été 2017.
(AFP)
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