vendredi 20 mai 2016

Pour l'OCDE, l'Euro 2016 devrait surtout permettre de créer des synergies territoriales

Quel développement économique local les dix villes hôtes de l'Euro 2016 de football peuvent-elles attendre de cet événement ? C'est, en résumé, la question que s'est posée le Centre pour l'entreprenariat, les PME et le développement local, une structure dépendant de l'OCDE. Sa réponse, est divulguée dans un rapport réalisé en collaboration avec le ministère de la Ville, de la Jeunesse et des Sports et les dix villes hôtes, intitulé "Les événements sportifs internationaux et le développement local : la France face à l'Euro 2016" et remis jeudi 19 mai à Patrick Kanner, ministre des Sports.
La question aurait pu se décliner en trois sous-questions, comme le suggère le centre dans son introduction : quelles retombées positives en termes de développement ? L'argent public injecté dans l'événement a-t-il été utilisé à bon escient ? Et enfin, et c'est sans doute là l'angle d'attaque le plus original de ce travail : au-delà de la réussite de l'événement et de ses effets, les villes-hôtes sauront-elles adopter des stratégies ambitieuses pour répondre à de nouvelles propositions d'événements et s'engager ainsi à renforcer leur développement à venir ?

Des bénéfices surestimés, des coûts sous-estimés

Avant de passer à l'examen du cas de l'Euro 2016, le rapport met en avant des données générales qui font notamment apparaître les nombreux effets bénéfiques de l'organisation de grands événements sportifs : renforcement de l'image du territoire, mise aux normes des infrastructures, rénovation de quartiers, création de nouvelles voies de communication, etc.
Toutefois, l'étude met aussitôt en garde contre plusieurs phénomènes. A propos de l'évaluation des retombées économiques, "la tendance à surestimer le nombre de visiteurs et de touristes est quasi systématique", précise-t-elle, avant d'ajouter qu'"à cette surestimation des bénéfices peut correspondre une sous-estimation des coûts, notamment en sécurité, en installations sanitaires ou en dégradation de l'environnement".
Et les auteurs de conclure sur ce point : "Ces études sont donc complexes et souvent contestées par le fait que leurs demandeurs cherchent en général à annoncer des résultats très positifs." Et, de fait pour ce qui est du cas qui nous intéresse, l'étude admet qu'"on ne peut dire que la France ait retiré des bénéfices spectaculaires de telles organisations". En témoignent la Coupe du monde de football 1998, pour laquelle le surplus de consommation et d'exportations touristiques n'a pas été réellement perceptible, et la Coupe du monde de rugby 2007 dont les retombées se situaient bien en-deçà des prévisions et l'impact a été trop localisé (à Toulouse et Marseille) pour réellement influer sur la croissance du pays.

Développer les synergies locales

Les effets positifs attendus d'un grand événement sportif, le Centre pour l'entreprenariat, les PME et le développement local les situent en réalité sur le long terme : "Les investissements en infrastructures décidés à l'occasion de la préparation de ces événements profitent à la ville et à ses habitants bien au-delà de la période circonscrite à l'événement." De fait, la réussite ou non de l'événement pour le bassin de vie et sa population va s'inscrire dans la durée et impliquer de nombreux acteurs. C'est une sorte de puzzle territorial qu'il va falloir assembler pour constater, longtemps après l'événement, si celui-ci aura eu ou non les retombées escomptées. A ce sujet, le rapport note pour l'Euro 2016 que si la mobilisation des partenariats est "plus ou moins forte selon les villes […], on peut dire ici que l'on est en train d'assister à une augmentation du savoir-faire au profit de projets dans des domaines aussi variés que l'aménagement urbain du cadre de vie (logement et transport, environnement), de l'emploi et de la formation, de la culture et du bien-être".
Pour les auteurs du rapport, le développement d'une culture de la collaboration entre différents acteurs au niveau de chaque collectivité impliquée est d'autant plus positif que la France est "un pays où les effets de la centralisation conduisent souvent à segmenter du haut vers le bas les initiatives et à limiter ainsi des synergies efficaces au niveau local". De fait, les tableaux très précis rapportant les initiatives prises dans les différentes villes-hôtes permettent déjà de constater que "la mise en oeuvre de l'Euro 2016 est partenariale, ce qui laisse augurer que les dynamiques mises en place créeront une atmosphère favorable à la coopération et à la synergie des acteurs de tels événements aux lendemains de l'Euro 2016".

(Localtis)

1 commentaire:

  1. Le relevé des actions engagées dans chaque ville reste néanmoins sur le principe des actions qui "devaient être mises en oeuvre" et non sur leurs résultats. Des séquences de job dating par exemple ayant été annulées (Toulouse) par manque … d'offres (les partenaires de l'UEFA ayant leurs propres réseaux).
    Pour l'OCDE les réserves sur les retombées économiques sont très claires (pour différents évènements d'ailleurs), mais gageons que certains ne les verront pas ! Les élus préfèrent souvent les bonnes nouvelles… comme celles légèrement exagérées du document du CDES.
    On peut remarquer toutefois, qu'entre le rapport du CDES de novembre 2014 et celui de l'OCDE, nous sommes passés pour les coûts de l'Euro 2016 de 1,7 milliard à 2 milliards… Et au prochain tour, après les rallonges liées aux problèmes de sécurisation des fans zones ? Mais on peut toujours faire comme pour la coupe du monde de 98 et mettre les coûts liés aux infrastructures dans un budget annexe !

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Journaliste spécialisé dans l'actualité sportive, j'ai collaboré, entre autres, à So Foot, Libération, Radio France Internationale. Aujourd'hui, je suis particulièrement les politiques sportives au plan national et dans les collectivités locales pour Localtis.