jeudi 2 juin 2016

"La situation budgétaire va amener à mutualiser les équipements sportifs"

Parmi les sujets abordés au congrès de l'Association nationale des élus en charge du sport (Andes), les 3 et 4 juin à Bourges, celui qui doit porter sur le contexte budgétaire des collectivités locales est sans doute l'un des plus attendus. A la tribune, Michel Champion, trésorier de l'Andes et premier adjoint au maire de Cholet (Maine-et-Loire), chargé des finances, mettra en avant l'intérêt du partage de bonnes pratiques et de la mutualisation. Il dévoile ses réflexions en avant-première pour Localtis.

Localtis - Vous allez évoquer lors du congrès de l'Andes le difficile contexte budgétaire et ses effets sur les collectivités locales. Comment se traduit-il sur le terrain ?
Michel Champion - Si je prends le contexte local à Cholet, on a subi depuis quelque temps déjà des baisses de dotations. De 2013 à 2017, on va avoir 4,5 millions d'euros de participation et de dotations en moins. Cela agit directement sur l'autofinancement. Derrière, c'est de l'investissement en moins. Certes on peut jouer sur les frais de fonctionnement, et on l'a déjà fait. Mais il arrive un moment où quand vous faites rouler un véhicule, il faut du carburant, donc la baisse des frais de fonctionnement a forcément une limite. Après, on peut jouer sur la suppression ou le non-renouvellement de collaborateurs.
De quelle manière le secteur du sport est-il touché ?
En sport, cela se traduit, soit par un décalage, soit un report à long terme d'un investissement, car les contraintes sur l'autofinancement contraignent aussi l'investissement à venir. En sport, on est forcément concerné, que ce soit pour les stades, les salles, les équipements nécessaires, et directement aussi sur les subventions aux associations, c'est systématique. Les réductions des subventions, ce n'est pas un constat local, mais général. Un quart des communes ont baissé leurs subventions aux associations sportives. Les baisses de subventions vont de 5 à 20% sur l'ensemble des analyses que l'on a faites. Mais on ne peut pas baisser de 20% tous les ans, sinon, il faut tout fermer et mettre tout le monde dehors.
Ce que vous décrivez est une réaction en chaîne…
Oui, la baisse de l'enveloppe équipements du CNDS [Centre national pour le développement du sport] a une répercussion directe sur les enjeux en termes d'équipements. Cela a des impacts à tous les niveaux. C'est la même chose dans le fonctionnement, où vous aurez des plages horaires modifiées parce qu'il faudra réduire le nombre de surveillants dans une piscine, par exemple. A un moment, cela a un impact sur les usagers, les associations et les événements sportifs organisés.
Après le constat, les remèdes. Lesquels envisagez-vous ?
Au congrès de l'Andes, nous allons d'abord essayer de recueillir des informations. Le but est d'échanger, de voir qui a réalisé des modifications, qui envisage d'en faire, et de quelle manière. La situation va forcément amener à mutualiser certains équipements, ce que l'on n'envisageait pas forcément il y a quelques années, quand les choses ne se passaient pas trop mal et chacun utilisait son propre équipement, mais peut-être pas à 100%. Avec les difficultés actuelles, on va forcément chercher à faire fonctionner l'équipement d'une autre manière. On peut trouver des solutions qui permettront de faire des économies, il faut des regroupements. Aujourd'hui, par exemple, les piscines et patinoires sont des équipements intercommunaux à Cholet, au même titre que le théâtre ou l'école de danse. On essaie d'utiliser au maximum ces équipements pour qu'ils répondent à la demande.
Même si cela doit impliquer des déplacements plus longs pour les usagers, les associations ou les scolaires ?
Mais il faut faire des choix. Faut-il une zone d'activités économiques dans chaque commune ou la centraliser dans une seule commune ? Tous les domaines sont concernés, que ce soit le sport, la culture, l'économie, le social. C'est un changement de comportement.
Il existe de nombreux leviers pour réaliser des économies, par exemple sur le sport professionnel…
Quand on demande des efforts, on en demande aussi au sport professionnel. A Cholet, où le sport professionnel est une compétence de l'agglomération, nous avons deux clubs professionnels, en basket et en tennis de table, qui participent également à la solidarité intercommunale. On a baissé leurs subventions d'environ 5%. Pour le basket, qui a un budget de 4,2 millions d'euros, notre participation était de 900.000 euros en subventions et un peu plus de 100.000 euros en prestations. Sur ce budget, une baisse de 50.000 euros, c'est peut-être la moitié de la rémunération d'un joueur.
Mais est-ce à la collectivité de participer à la rémunération d'un joueur professionnel ?
On est bien d'accord, il y aura des modifications à réaliser dans l'avenir…
Autre levier d'économies : les normes des installations sportives. Là encore, un chantier prioritaire pour l'Andes…
L'Andes se bat sans cesse auprès des fédérations pour avoir quelque chose de cohérent en la matière. On ne peut pas être à la disposition des fédérations pour un jour changer les lignes d'un terrain, ou autre chose. On nous dit toujours que cela ne coûte rien, mais quand vous avez une vingtaine de salles, cela coûte forcément de l'argent. Depuis une quinzaine d'années, grâce à l'action de l'Andes sur la question des normes, nous avons estimé les économies réalisées entre 300 millions, a minima, et un milliard d'euros.
Les fédérations comprennent-elles les contraintes des collectivités ?
Je ne suis pas encore sûr, il faut encore faire passer des messages. Le mouvement sportif n'a pas encore totalement interprété que la collectivité fait des efforts, mais que chacun doit aussi prendre sa part à un moment. Cela fait partie des discussions que l'on peut avoir avec les fédérations. Ce sera plus que jamais notre ligne de conduite.

(Localtis)

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Journaliste spécialisé dans l'actualité sportive, j'ai collaboré, entre autres, à So Foot, Libération, Radio France Internationale. Aujourd'hui, je suis particulièrement les politiques sportives au plan national et dans les collectivités locales pour Localtis.