Événement médiatique, un brin folklorique du Top 14, le 105e derby
basque Bayonne-Biarritz oppose les deux derniers du classement et revêt
une dramaturgie telle que l'idée d'un rapprochement trouve de plus en
plus d'écho, sous peine, un jour, de tout perdre.
Le Pays basque est clairement divisé quand on aborde la cause
rugbystique. Il y a les partisans de Biarritz, le club le plus titré (5
titres de champion de France, dont trois en 2002, 2005 et 2006), et ceux
de Bayonne, le club le plus populaire, qui ne cessent de se déchirer
chaque année à l'approche du derby, leur exutoire préféré.
Depuis peu, a émergé une nouveau discours chez certains dirigeants et
anciens joueurs, priorisant l'aspect économique et le réalisme sportif
et militant pour un changement de statuts.
Quand le club de Serge Blanco planait sur la France du rugby, que
l'Aviron vivotait juste au-dessus de la ligne de flottaison, jamais
l'idée d'une union, d'une fusion ou la création d'une province n'aurait
effleuré les esprits basques, très conservateurs rugbystiquement
parlant.
Mais la donne a changé avec l'arrivée de grands argentiers à Toulon,
Montpellier ou au Racing-Métro, qui a dessiné une nouvelle hiérarchie
faisant la part belle aux métropoles.
Bayonne possède le sien avec l'opticien Alain Afflelou, sans pour autant
avoir de résultats probants. Et Biarritz a perdu une partie de ses
ressources avec le désengagement personnel de Serge Kampf -qui a épongé 3
millions d'euros de déficits ces deux dernières saisons- même s'il
garde toutefois le soutien de son entreprise Capgemini.
Se pose donc la question de la coexistence, à trois kilomètres de
distance, de deux clubs aux budgets pratiquement similaires (entre 17 et
18 millions d'euros) sur un territoire de 130.000 habitants, une zone
de chalandise limitée avec des partenaires économiques divisés.
En mai, pour la première fois depuis sa remontée dans l'élite en 2004,
l'Aviron a fini devant le BO. Sans parler de passation de pouvoir, les
événements qui ont agité Biarritz cet été (licences bloquées par la
DNACG, le gendarme financier de la Ligue, pour contrôler la masse
salariale, recrutement minimaliste faute d'argent, départ des jeunes
Lauret et Barraque...) ne font plus du BO la locomotive régionale.
Témoin de cette tendance, Jean-Michel Gonzalez, ancien talonneur
international des deux clubs et entraîneur du BO il y a encore deux ans,
est navré de cette situation.
Pour éviter «une grande désillusion», le technicien qui n'était
initialement «pas pour la fusion ou un rapprochement entre les deux
clubs» estime qu'«avec le temps, on n'aura pas le choix». «Il va falloir
faire une seule et même équipe de haut niveau, penser à se regrouper
pour que la région puisse s'en sortir», affirme-t-il.
Autre voix qui compte, celle de l'ancien pilier international de Bayonne
Pierre Dospital. «Pour nous (Bayonnais), ça ne change pas grand-chose,
on aborde le derby 9 fois sur 10 mal classé. Mais voir les Biarrots au
même niveau que nous, voire plus bas... Un derby entre les deux
derniers, c'est regrettable. Mais si on en est là, c'est qu'on le
mérite.»
Doxpi «plaide depuis douze ans pour la création d'une franchise régionale sur le modèle celte, regroupant tous les clubs basques, avec un stade
de 25.000 places», Bayonne et Biarritz conservant leurs centres de
formation.
«Le problème, c'est qu'aujourd'hui, chacun veut son stade, personne ne
veut lâcher son bout de gras. On a mordu dedans, tout le monde +gnaque+
là-dessus, ils le tiennent entre les dents et ne veulent pas le lâcher»,
conclut-il, résigné.
(AFP)
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