Elle sont grasses, plus toujours très vertes et vivent mal l'hiver. Les pelouses de Ligue 1 et Ligue 2 n'ont pas
vraiment une bonne réputation comme on a pu le constater ces derniers jours. Mais alors d'où vient ce mal
français ?
[...] A en croire David-Pierre Mangiapan, consultant pour Monaco Euro Méditerranée porteur de projets dans des
stades en Afrique du Nord, le problème des pelouses françaises réside essentiellement dans leur mode de
gestion : « Les derniers stades sont souvent construits sous la forme de PPP (partenariats public-privés) et la
pelouse est sous-traitée à des entreprises spécialisées. Lorsque les stades appartiennent à la commune, ce sont
les services municipaux qui s'en occupent. En France, le dialogue à plusieurs complexifie le processus. ». Le
principal mal serait donc là. Ce que confirme Antoine Lisolo, président de la commission des terrains de la
Ligue Méditerranée : « La majorité des clubs ne sont pas propriétaires de leur stade. Ils ont bien souvent des
contrats qui leur permettent seulement d’exploiter l’enceinte. ». Cette multiplicité des acteurs conduit donc à
des situations où les enjeux politiques d'une ville prennent le pas sur l'intérêt sportif. A Saint-Étienne, le club
s’est heurté à la volonté des pouvoirs publics concernant le chauffage de sa pelouse en période hivernale. Trop
couteux, trop lourd : l’agglomération a refusé de payer la facture, laissant cette charge aux dirigeants
stéphanois. Propriétaires soucieuses de faire des économies, les villes ont donc leur part de responsabilité dans
l'état des pelouses. Mais la multiplicité des acteurs n'explique pas tout. A Nice, alors que Vinci, prestataire
choisi pour mener à bien le projet Allianz Riviera, avait tout à loisir de réaliser un projet d'envergure, le retard
accumulé a plombé la pelouse pour cette saison au moins. Terminé à la va-vite début septembre, c’est un
rectangle vert pas totalement enraciné qui subissait deux semaines plus tard les lourds assauts des rugbymen
de Toulon et Clermont. Six mois plus tard, l’heure est déjà au replaquage.
A Monaco, le problème est plus profond. Construit sur un parking, le terrain atteint en été la température
énorme et meurtrière de 50°, une chaleur difficile à supporter pour n’importe quel gazon. D’un amateurisme
certain, ces décisions structurelles gâchent une partie du spectacle proposé chaque week-end. Pour David-
Pierre Mangiapan, le calcul des clubs est souvent erroné : « Concernant le Stade Louis II, ils ont voulu faire des économies sur des postes de dépenses qui au départ sont couteux mais sont très rentables sur le long terme
». En filigrane, certains pourraient même y voir un business de la pelouse. Car pour des prestataires de
services, chaque replaquage ou changement de pelouse représente une manne supplémentaire. De là à parler
d'un trafic d'herbe...
La comparaison fait mal. En France, lorsqu'on compte trois ou quatre jardiniers pour une pelouse de Ligue 1,
ils sont une vingtaine en Angleterre. « Les clubs sont propriétaires de leur stade et les moyens affectés ne sont
donc pas les mêmes », explique David-Pierre Mangiapan. Pour répondre à cette faiblesse nationale, la LFP a
lancé un championnat de France des pelouses, qui existe déjà à l'étranger depuis plusieurs saisons. La qualité
du terrain est également devenue un critère dans l'attribution de la "licence club". Cet outil invite les clubs à se
développer avec pour carotte la répartition de 10% des droits télé entre les clubs. « Le Championnat de France
des pelouses a été créé pour faire un benchmarks des bonnes pratiques. C'est bien de mettre en valeur les
bonnes pratiques mais si tu ne mets pas les moyens qui sont nécessaires à les promouvoir, ça ne sert à rien »,
affirme David-Pierre Mangiapan. Chose que confirme Antoine Lisolo : « Le projet a au moins le mérite de
faire émerger des concepts et des pratiques ». Mais il faut croire que l'initiative n'a pas eu l'effet escompté.
Cette saison, tous les clubs de Ligue 1, à l'exception d'Ajaccio, ont obtenu cette licence club alors que la
France du foot a encore droit à des pelouses bien dégueulasses...
Autre manque : l'absence d'échange entre les jardiniers des différents clubs qui confirme le manque de «
culture pelouse » en France. Un ancien jardinier de l'élite confirme : « On aurait aimé avoir plus d'échanges
entre nous. On ne se rencontrait jamais, il n'y avait aucune interaction. ». A côté de cela, des clubs comme
Lorient, Châteauroux ou Nancy ont fait le choix du synthétique, « qui permet de faire des économies à courtterme
mais ne satisfait visiblement pas tous les joueurs à long-terme », ajoute David-Pierre Mangiapan.
D'autres se sont attaché les services des meilleurs jardiniers du monde. C'est le cas du PSG, qui s'est offert lors
du dernier mercato estival le savoir-faire de Jonathan Calderwood, élu meilleur jardinier de Premier League en
2009 et 2012 avec Aston Villa. [...]
(So Foot)
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