Depuis plusieurs semaines, les dirigeants du Stade Toulousain font
entendre une voix puissante et dissonante contre des mesures prises par
les instances dirigeantes du rugby français qui menacent selon eux
l'avenir du club et de leur sport.
L'information révélée le 20
décembre, au lendemain de l'Assemblée générale de la LNR, a fait grand
bruit: Jean-René Bouscatel, le président de Toulouse, club le plus titré du rugby français (19 titres) et
européen (quatre Coupes d'Europe), a présenté sa démission du comité
directeur de la LNR, dont il était un membre influent depuis 1998.
La
limitation à 30 matches par saison (hors phase finale du Top 14 et
Coupe d'Europe) pour 30 internationaux du XV de France prévue par la
nouvelle convention FFR-LNR a été la goutte d'eau qui a fait déborder le
vase Rouge et Noir.
"On ne peut pas continuer à aller dans le
mur. Quand les 30 meilleurs joueurs du Top 14 ne pourront pas jouer la
moitié des matches, je dis que c'est une compétition inéquitable,
dévalorisée", explique le dirigeant qui s'était déjà élevé en octobre
contre le renforcement du dispositif des Jiff (joueurs issus des
filières de formation). Il avait été le seul membre du comité directeur
de la LNR à voter contre cette mesure.
"Nous ne sommes pas
suffisamment pragmatiques, on croit régler les problèmes en édictant des
textes. Il faut arrêter de contraindre les clubs. Il faut faire en
sorte de donner un espace de liberté, c'est mon but. Je crois que c'est
dans la liberté et la concurrence qu'on peut se développer."
Le manager Guy Novès, autre
figure emblématique du rugby français et européen, lui a emboîté le pas,
avec ses raisons sportives. Le club toulousain est le principal
pourvoyeur d'internationaux du XV de France (10 en 2013, contre 7 à
Clermont ou 4 à Toulon) et donc le premier pénalisé par une plus grande
présence des internationaux avec le XV de France.
"Aujourd'hui, on
nous apprend en cours de saison que des stages nous priveront encore de
joueurs internationaux. On ne peut pas faire jouer les meilleurs, pas
les jeunes (Tolofua ou Camara en équipe de France des moins de 20 ans,
ndlr), ni les étrangers en raison de la règle des Jiff", peste-t-il.
"On
va tuer le rugby des clubs, et à moyen terme le rugby. Mais au moins,
la France sera championne du monde en Angleterre" (en 2015), ironise le
technicien.
"C'est un truc de fous ! On va devoir calculer le
nombre de matches de nos internationaux sans savoir le nombre de leurs
sélections. Si on les utilise trop, on ne les a plus à la fin. Si on ne
les utilise pas, on les a à la fin mais on perd des matches au début. Si
on ne les utilise pas et qu'ils se blessent, comme Fritz (indisponible 2
à 3 mois après un accident de moto fin décembre, ndlr), on ne les a pas
quand même".
Sentant le vent tourner, le club a
amorcé un changement de cap depuis trois ans en faisant appel à un
contingent plus important de joueurs étrangers (les Sud-Africains
Steenkamp, Ralepelle, Vermaak et Ferreira, les Néo-Zélandais McAlister
et Gear, le Samoan Tekori, le Fidjien Qera...) même si un certain nombre
sont sélectionnables avec leurs équipes nationales.
"Et comment
s'adresser aux autres joueurs, qui savent désormais qu'ils vont jouer
pendant que les internationaux seront en équipe de France ? Comment les
remettre dans le sens du travail ?", s'interroge Novès en estimant que
ces mesures pourraient également mener le club à réduire la formation
des jeunes puisqu'ils seront "potentiellement sélectionnables".
Le président Bouscatel, qui se dit "plus libre et apaisé" depuis sa démission, va
plus loin. Il espère lancer un mouvement pour "changer de la
représentativité des instances", passer à un Top 12 et réfléchir à une
refonte du calendrier international. De quoi permettre à son club de
vivre durablement avec ses internationaux.
En attendant dimanche,
les internationaux toulousains seront bien sur la pelouse du stade
Ernest-Wallon pour accueillir les plus discrets Clermontois, leurs
rivaux en Top 14 mais partenaires du XV de France.
(AFP)
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