Si les deux principales candidates à la mairie de Paris ne sont pas opposées
à une vente du stade qui héberge le SG,
celle-ci serait cependant délicate à mettre en pratique.
C’EST UN DES RARES SUJETS sur lequel
elles sont d’accord. Dans L’Équipe
du 4 février, Anne Hidalgo et Nathalie
Kosciusko-Morizet, candidates PS et
UMP aux prochaines élections municipales
à Paris (23 et 30 mars), se sont
déclarées prêtes à envisager la vente
du Parc des Princes. Propriété de la
ville, il deviendrait celle de Qatar Sport
Investments (QSI), actuel détenteur du
PSG. La transaction offrirait une rentrée d’argent
frais à la municipalité et
lui économiserait les coûts d’entretien
(estimés à un million d’euros par an).
QSI verrait de son côté ses projets de
rénovation du Parc facilités et se délesterait
de la redevance payée annuellement
à la mairie.
Mais un tel changement de propriétaire
reste une perspective lointaine,
car sa mise en oeuvre soulèverait
de nombreuses difficultés.
«D’abord, il faudrait déclasser le stade
du domaine public, en démontrant
que cette vente n’affecterait pas le service
public, explique Patrick Bayeux,
qui réalise des missions d'assistance à
maîtrise d'ouvrage auprès des collectivités
locales. Une telle procédure
susciterait un vrai débat politique.» Et
surtout la municipalité devrait répondre
à une question délicate : combien
vaut le Parc aujourd’hui ? Cyril Cartron,
conseiller technique à la mairie de Paris dans le domaine du sport,
interrogé
sur le sujet, avoue sa perplexité. «Si la
situation se présentait, il faudrait faire
plancher les directions de l’urbanisme
et des finances de la mairie pour déterminer
un prix. On ferait aussi appel
à des cabinets spécialisés dans les
transactions immobilières.»
Pour tenter d’y voir plus clair, nous
avons sollicité deux analystes de l’un
de ces cabinets (Cushman&Wakefield),
Laurent Conrad et Rodolphe Lebas.
«Déterminer ce prix serait très
complexe, confirment-ils. Le cadre juridique
caractérisant la propriété et
l’exploitation de ce type d’équipement
constitue notamment un obstacle de
taille. Et il n’existe pas aujourd’hui en
France de marché de transactions
comparables.»
Les économistes du sport, sollicités
sur l’élaboration des critères à prendre
en compte pour établir le prix du Parc,
ont multiplié les réponses... divergentes.
Pour certains, il faut se baser sur le
prix de l’immobilier dans le XVIe arrondissement
parisien (où l’enceinte
est localisée), pour d’autres sur le coût
de la reconstruction du stade (90 millions de francs de 1972,
soit 85 millions
d’euros actuels). Mais, selon Olivier
Monna, responsable d'une formation
de stadium manager pour le Centre
de droit et d'économie du sport, «il
faut privilégier une approche économique
et se dire “grâce à cet outil, quel
business fait le PSG?” ». La question
n’est pas anodine : le club parisien a
engrangé la saison dernière, selon le
cabinet Deloitte, 53,2 millions d’euros
de recettes tirées de la billetterie et de
services au stade.
Mais une fois tous ces paramètres
pris en compte, aucun de nos experts
ne s’est avancé à donner un prix pour
le Parc. Seul l’un d’eux s’est risqué à un
rapide calcul, livré en off. «Quand on
construit un stade neuf, on dit qu’une
place coûte environ 7.000 euros. Si tu
multiplies ce chiffre par le nombre de
places du Parc (47.000), ça donne
330 M€. Ensuite, tu retires les 75M€ de
travaux que le PSG va faire d’ici à
l’Euro 2016 et tu divises le total par
deux, compte tenu de la vétusté du
stade. Tu obtiens environ 130M€. Pour
moi, le prix du Parc se situe dans ces
eaux-là. » Une estimation qui fait
bondir le professeur d’économie
Pierre Chaix, qui a coordonné
l’ouvrage les Grands Stades (L’Harmattan,
2011). «Vous rigolez ou quoi ?
Depuis quarante ans, ce stade s’est
beaucoup déprécié et, aujourd’hui, la
mairie serait incapable d’avancer les
cent millions d’euros nécessaires pour
le rénover complètement. Il n’y a que
QSI qui peut mettre cet argent sur la
table. Pour moi, la valeur du Parc se situe plutôt
du côté de l’euro symbolique.
»
À ce prix-là, il n’est pas certain
qu’Anne Hidalgo ou Nathalie Kosciusko-Morizet soient encore prêtes à
vendre.
(L'Equipe)
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