Premier comité en nombre de licenciés, l'Ile-de-France peine pourtant à remplir
durablement ses stades de rugby, à l'image de ses deux porte-drapeaux en
Top 14 le Racing-Métro et le Stade Français, qui doivent affronter une
forte concurrence culturelle et sportive.
Où vont chaque week-end
les quelque 48.000 licenciés franciliens ? Visiblement, pas ou peu au
stade. Sans doute sont-ils d'abord retenus sur la pelouse pour leurs
propres matches, souligne Jean-Louis Boujon, président du comité Ile-de-France.
Symptôme
de ce relatif désintérêt, le dernier derby entre le Racing-Métro et le
Stade Français, à Jean-Bouin le 29 mars, où un millier de places sur les
20.000 du stade étaient vacantes, en dépit du fort enjeu sportif et
d'une programmation favorable (samedi, 15H00, grand soleil).
A
l'heure où les frères ennemis régionaux se retrouvent ce samedi (16H35),
l'antre du XVIe arrondissement sera-t-il plein ? L'an passé, Jean-Bouin
a accueilli en moyenne 13.200 spectateurs sur 12 matches, soit un taux
d'occupation de 66%, tandis qu'Yves-du-Manoir à Colombes, où joue le
Racing-Métro, n'a reçu que 7.900 spectateurs sur 14.000 places (56% de
remplissage).
"C'est un problème de choix avec toutes les autres
activités que les Parisiens peuvent avoir quand ils sont en week-end",
répond le président du Stade Français Thomas Savare.
"A nous de
les attirer, de leur montrer que c'est un spectacle de qualité dans un
bel endroit, ajoute-t-il. Paris est un environnement très particulier."
Le
président du Racing-Métro Jacky Lorenzetti avance, lui, trois facteurs:
"la crise économique", "le succès" ("une équipe qui gagne attire du
monde et l'on n'a encore rien gagné"), et l'accessibilité de son stade
de Colombes ("c'est infernal pour y aller").
"On a un très bon
taux de conquête de spectateurs mais malheureusement ils reviennent peu
car ils sont découragés par les transports, les moyens d'accueil et les
parkings sur place", déplore M. Lorenzetti.
La stratégie des clubs
et de leurs services marketing n'est pas non plus étrangère à cette
affluence aléatoire: "le vrai business du sport, ce sont les VIP",
souligne ainsi Lionel Maltese, spécialiste de marketing sportif et
professeur associé à la Kedge Business School. Et le grand public, au
portefeuille moins garni, passe donc un peu au second plan.
Du
coup, les grands événements populaires qu'avait su créer l'ancien
président du Stade Français Max Guazzini, capable de remplir le Stade de
France, se font de plus en plus rares. Et se dessine en filigrane un
problème d'offre.
"Le sport en tant que tel ne suffit plus, même le Top 14 qui
propose de superbes affiches ne suffit plus", souligne Lionel Maltese,
tout en soulignant la concurrence aussi exercée par les diffuseurs qui
proposent une couverture télévisée de qualité.
"Le stade doit
donc offrir une expérience et des services supplémentaires aux
spectateurs", poursuit-il, évoquant un vrai lieu de consommation.
Même
si M. Lorenzetti ne croit guère à l'efficacité d'un "grand barnum"
autour d'un match de rugby, la future enceinte du Racing à Nanterre
(30.000 places) devrait faire entrer le club dans une nouvelle
dimension.
"60% des boîtes du CAC 40 sont à côté à La Défense, ce
sera la folie sur les VIP, s'enthousiasme Lionel Maltese. Si en plus le
Racing parvient à travailler sur les fans..."
En attendant, les
clubs professionnels doivent effectuer un important travail d'ancrage
sur le territoire afin de développer "une vraie identité rugbystique
parisienne ou francilienne", dixit Jean-Louis Boujon.
L'objectif:
"travailler en réseau, autour de quatre grands clubs, le Racing-Métro
(Hauts-de-Seine), le Stade Français (Paris), Massy (Essonne) et Bobigny
(Seine-Saint-Denis)."
Des accords existent déjà, comme au Racing
qui "essaime auprès des clubs de la première couronne pour essayer de
capter des talents", selon M. Lorenzetti.
"Mais en ce moment, les
réformes territoriales vont bon train, la +métropole Grand Paris+ se
constitue pour réunir 6,5 millions de personnes, note encore M.
Lorenzetti. On s'inscrit dans un territoire évolutif et ça nous plairait
bien de pouvoir être un jour le Racing Grand Paris".
(AFP)
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