La gouvernance du prospère imprimeur de billets Oberthur Fiduciaire
déchire la famille Savare avec d'un côté le père et le fils et de
l'autre deux soeurs, qui s'affrontent en justice autour de l'engagement
du groupe dans le rugby.
Emmanuèle et Marie Savare exigent de
réintégrer le comité de direction de l'entreprise familiale dont elles
ont été évincées en début d'année, a expliqué mardi devant la presse
leur avocat Henri d'Armagnac.
Les deux soeurs fondent leur
démarche sur "des dérives importantes, autant dans la gestion que dans
les résultats, et dans l'usage des biens qui sont faits du groupe",
selon leur avocat.
Elles "sont totalement privées de leur droit le
plus élémentaire (d'actionnaire), notamment à l'information", a dénoncé
Me d'Armagnac.
"Le groupe va très bien. Leur patrimoine a bien
augmenté. Elles n'ont pas à être inquiètes", leur a répondu, dans des
déclarations à l'AFP, leur frère Thomas Savare.
Les deux soeurs
ont connu un premier revers en étant déboutées de leurs demandes par le
Tribunal de Commerce de Paris le 23 septembre.
Notant "un contexte
de relations familiales devenues difficiles", le tribunal avait estimé
que la révocation des deux femmes de leurs fonctions n'affectait "ni
leur situation, ni leur droit de vote en assemblée générale" des
actionnaires.
Il relevait que leur père Jean-Pierre Savare
disposait in fine du pouvoir de décision en assemblée générale et qu'une
décision adoptée contre l'avis d'actionnaires minoritaires pouvait
difficilement être assimilée à un abus de majorité.
Les deux
soeurs se sont immédiatement pourvues en appel contre ce jugement et la
Cour d'appel du tribunal de Paris devrait rendre sa décision au
printemps 2015.
"On verra bien", commente laconiquement Thomas Savare à propos de l'issue du contentieux judiciaire.
- La "danseuse" du groupe -
Devenu en début d'année, avec le soutien de son père, président de la holding de contrôle du groupe, Thomas Savare dirige depuis juin 2011 le club de rugby parisien du Stade Français.
Une
passion qui cristallise la majeure partie des inquiétudes des deux
soeurs, et qui aurait déjà coûté au groupe "30 millions d'euros", selon
leur avocat.
Une aventure, commencée en 2011 par la reprise du
club, contre un chèque de 6,6 millions d'euros, et jalonnée depuis
d'échecs (aucune phase finale de Top 14), en dépit de la mise à
disposition d'un stade Jean-Bouin flambant neuf par la municipalité
parisienne.
Le club est devenu la "danseuse de Thomas Savare", a dénoncé Me d'Armagnac.
Depuis le 1er juillet, Oberthur n'est plus sponsor principal du maillot du club, rôle désormais dévolu à Numéricable.
Mais
Oberthur doit encore renflouer le club qui n'a toujours pas réussi à
décrocher son ticket pour une lucrative coupe européenne.
"C'est
un sport dont on partage les valeurs, une belle marque française",
assure M. Savare. "C'est une entreprise en redressement mais la holding a
déjà eu des entreprises en redressement", dit-il encore.
"La
famille Savare reste fidèle à ses engagements" et le groupe Oberthur "au
Stade Français", rappelait le père Jean-Pierre Savare début octobre.
Devant
l'impasse, Me d'Armagnac dit avoir été mandaté pour "étudier toute
solution d'ordre capitalistique dans l'intérêt et la pérennité du
groupe".
En d'autres termes, il a été chargé d'étudier la vente
des actions détenues par les deux soeurs, ouvrant ainsi la porte à des
investisseurs non issus de la famille.
Les enjeux financiers sont
importants. En décembre 2011, Oberthur avait cédé 90% de sa filiale
spécialisée dans les cartes à puces pour 1,15 milliard d'euros au fonds
américain Advent.
Jean-Pierre Savare possède 12,61% des parts du
groupe en pleine propriété et 66,15% en usufruit. Avec le soutien de son
fils, qui possède 7,08% des parts en pleine propriété et 22,05% en nue
propriété, tout comme ses soeurs, le père reste maître du jeu.
(AFP)
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