Peu avant minuit, une habitante d'un immeuble du sud-ouest de Paris
voit chuter un homme devant sa fenêtre, au 21e étage. Il ne s'agit ni
d'un suicide ni d'un accident, mais d'un sport extrême.
En fait,
"ils étaient trois. Une fois en bas, ils ont plié très vite leurs
parachutes, grimpé dans une voiture et démarré à toute allure", déclare
cette Parisienne à l'AFP.
Le "base jump", ou saut en parachute
depuis un point fixe naturel ou artificiel, est apparu en France dans
les années 80, en provenance des Etats-Unis. A l'époque, on sautait
surtout d'immeubles et de ponts, jugés plus sécurisants que la montagne.
Avec
l'évolution du matériel et des techniques, le saut depuis les falaises a
pris le pas sur le frisson depuis les hauteurs urbaines et constitue
désormais une discipline à part entière, le paralpinisme, reconnu comme
sport de montagne.
Les sauts en ville, devenus marginaux, sont
eux strictement interdits, mais le témoignage de cette femme éberluée en
atteste, ils subsistent.
"En ville, on peut sauter de tout ce qui
fait plus de 60 mètres. Il ne doit pas y avoir de vent et la voie
en-dessous doit être dégagée. Pas de lampadaires, etc. On essaie
d'accéder au toit ou d'escalader la façade sans l'endommager", explique
Rodolphe, 1.200 sauts urbains et naturels à son actif, soit environ 15
heures passées en l'air.
Des vidéos sur YouTube immortalisent
ainsi des sauts depuis la tour Eiffel, la tour Montparnasse ou des
immeubles du quartier d'affaires de La Défense. Généralement, les sauts
ont lieu à la nuit tombée et sont suivis d'une fuite pour éviter les
représailles.
Ces sauts illégaux sont pourtant mal vus dans une
discipline qui voudrait se défaire des clichés d'irresponsabilité et
dont les adeptes sont souvent qualifiés de têtes brûlées. En 2005, un
Norvégien de 31 ans avait trouvé la mort en sautant en parachute de la
tour Eiffel.
"J'ai fait mes premiers sauts d'un pont de 105 mètres. C'est
idéal de commencer d'un pont. J'ai aussi sauté illégalement d'un
building, mais franchement, je déteste le stress lié à cela. Je préfère
clairement voler tranquillement dans mes montagnes depuis de belles
falaises, sans peur de représailles ridicules de la police parce que
l'on se fait plaisir", explique l'athlète suisse Géraldine Fasnacht.
"Ce
n'est pas l'image qu'on veut donner de notre sport. Ceux qui sautent en
ville le font surtout parce qu'ils y habitent, mais je vous assure que
90% des sauteurs préfèrent les falaises", assure lui aussi Roch Malnuit,
président de l'Association française de BASE Jump.
"Tout semblait
calculé, ils étaient visiblement très pro. Mais ça peut donner des
idées à des gens beaucoup moins bons", s'inquiète l'habitante de
l'immeuble parisien dont se sont élancés trois base-jumpers.
Le base jump nécessite en effet une longue préparation et du matériel adapté.
"Il faut avoir effectué 250 à 300 sauts d'avion avant de pouvoir commencer. Cela peut durer des années et représente un vrai budget:
un saut d'avion coûte environ 35 euros et un parachute en moyenne 2.500
euros. Il y a des gens qui voudraient faire un saut juste pour mettre
une vidéo sur YouTube...", regrette Jean-Philippe Gady, président de
l'Association de paralpinisme.
Les GoPro, petites caméras que les
sportifs s'accrochent à la tête pour filmer leurs exploits et les
partager en ligne, ont fait "beaucoup de mal", confiait à l'AFP en 2013
l'alpiniste Erich Beaud qui, il y a trente ans, a été un des pionniers
du base jump en France.
"Aujourd'hui, beaucoup de gens qui n'y
connaissent rien veulent acheter de l'équipement. Mais quand certains
font des bêtises ça pénalise toute la communauté", regrette M. Malnuit.
(AFP)
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