lundi 17 novembre 2014

CAN-2015: Les Equato-Guinéens partagés entre fierté et inquiétude

Partagés entre fierté d'accueillir la compétition sportive la plus populaire d'Afrique et inquiétude face à l'épidémie de fièvre Ebola, les Equato-Guinéens s'interrogent sur l'opportunité d'organiser la Coupe d'Afrique des nations de football (CAN-2015) du 17 janvier au 8 février.

"La décision d'accueillir la CAN dans ces délais, je trouve que c'est peu responsable, on ne devrait pas l'accepter. Il fallait un peu plus de prudence: je doute fort de la capacité organisationnelle du pays et il y a Ebola", a déclaré à l'AFP Alfredo Okenvo, dirigeant associatif à Bata, la deuxième ville de Guinée équatoriale, joint par téléphone depuis Malabo, la capitale de ce petit pays d'Afrique centrale.
Après la mise à l'écart du Maroc qui demandait une report du tournoi en raison de l'épidémie de fièvre Ebola en Afrique de l'ouest, la Confédération africaine de football (CAF) a choisi vendredi dans la précipitation la Guinée équatoriale pour organiser la compétition, dans à peine deux mois.

- Ebola contre retombées financières - "La décision du Maroc, qui est supérieur à nous en matière d'infrastructures de football et de santé, a été prudente et responsable, alors si la Guinée équatoriale a déjà pris la CAN, je ne sais pas s'il y a des contacts avec les pays avancés en médecine", s'est interrogé M. Okenvo.
A contrario, Agnès Esidang, commerçante à Malabo, se réjouit déjà: "La CAN ici, c'est une bonne nouvelle, ça veut dire qu'il y aura les entrées (des supporteurs) et nous qui avons les bars on aura beaucoup de clients."
Le débat est posé. Entre craintes d'une éventuelle arrivée du virus Ebola et retombées financières de la compétition. Et aussi fierté nationale.
Il y a moins de vingt ans encore, avant les découvertes de gisements pétroliers, la Guinée équatoriale, miséreuse et se relevant à peine d'une histoire sanglante, était regardée avec dédain par ses voisins. Et les "Equatos" comme on les appelait avec condescendance en Afrique centrale étaient contraints à l'immigration dans les pays voisins pour survivre: femmes ménagères et hommes à tout faire. Souvent sous les quolibets, au Gabon ou au Cameroun.

- Revanche sur l'histoire - Aussi, organiser la CAN seule - le pays l'a déjà co-organisée en 2012 avec le Gabon -, constitue une forme de revanche sur l'histoire. Malgré les doutes.
"Je ne suis pas d'accord, la CAN marche avec beaucoup de gens et il y a encore Ebola, moi j'ai les enfants et la famille", dit Brigida Bidang, jeune infirmière mère de deux enfants.
Pour Agustin Masoko Abegue, porte-parole du Congrès national de Guinée équatoriale (opposition), "cette décision a été prise à la légère". "Le Maroc a vu les conséquences (...) Je pense qu'on ne devait pas accepter de prendre cette CAN, mais si on a déjà accepté, la décision est déjà là. On connait déjà les gens qui seront responsables de ce qui peut se passer au futur", prévient-il.
Du côté des soutiens du pouvoir, la tonalité est évidemment différente. "Je salue cette décision du président Teodoro Obiang Nguema d'accueillir la CAN. La CAF s'est retrouvée dans une situation délicate après le désistement du Maroc. Je me réjouis de cette décision de la Guinée équatoriale, et je félicite et encourage le président équato-guinéen à maintenir l'élan de la solidarité agissante africaine que nous prônons", a ainsi scandé Souleymane Anta Ndiaye, président du Forum de la renaissance africaine (Fora), reprenant à son compte la phraséologie d'un régime régulièrement sous le feu des organisations de défense des droits de l'Homme pour sa répression de l'opposition et des médias.

(AFP)

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Journaliste spécialisé dans l'actualité sportive, j'ai collaboré, entre autres, à So Foot, Libération, Radio France Internationale. Aujourd'hui, je suis particulièrement les politiques sportives au plan national et dans les collectivités locales pour Localtis.