Pour espérer battre Boston, Rome ou Hambourg dans la course à
l'obtention des jeux Olympiques d'été 2024, Paris va devoir déployer une
vaste opération de lobbying, un exercice subtil de séduction engagé
avant même l'officialisation de la candidature et dans lequel Londres
avait excellé pour obtenir les JO 2012.
"En France, on prend ce
terme de lobbying avec une connotation négative, péjorative. Dès qu'on
parle lobbying, tout de suite les gens font le raccourci avec
manipulation, avec corruption", confie Jean-Christophe Rolland,
président de la Fédération internationale des sociétés d'aviron.
"Mais,
non, le lobbying c'est comment dans un cadre un peu moins formel, on se
rencontre, on explique les choses, on apprend à se connaître et les
Anglo-saxons savent très bien faire. C'est une dimension, un outil qu'il
nous faut utiliser comme les autres", souligne encore le champion
olympique de Sydney, présent à Sotchi à la convention SportAccord, qui
réunit toutes les grandes fédérations internationales sportives.
Et
dans les salons du cossu hôtel Radisson Blu, à deux pas du centre de
convention, les rendez-vous allaient bon train cette semaine entre
membres de fédérations, de comités de candidature, lobbyistes et autres
consultants qui travaillent sur les candidatures déclarées de Rome,
Boston et Hambourg et quasi-officielle de Paris.
"Rome a envoyé
une grosse équipe à Sotchi qui réalise un énorme travail en coulisses",
confiait un représentant américain. "Boston possède un léger avantage
sur Paris car le projet américain est actif déjà depuis trois ans sur le
plan international".
Les Français qui devraient officialiser leur
candidature avant l'été, pour pouvoir profiter du Congrès du Comité
international olympique fin juillet à Kuala Lumpur, étaient eux présents
à travers Bernard Lapasset, président de l'Association Ambition
Olympique et de la Fédération internationale de rugby (ex-IRB/World
Rugby) et d'Etienne Thobois, homme d'expérience et de réseaux, ancien
directeur général de la Coupe du monde de rugby 2007 et ex-consultant de
Tokyo 2020.
En visite la semaine dernière à Tokyo, dont il souhaite
s'inspirer, le ministre français des Sports Patrick Kanner a estimé que
la candidature de Paris, tout en maîtrisant les coûts devra faire
l'objet d'un "lobbying forcené".
Lors de l'échec de la candidature
parisienne aux JO-2012, le choix de Londres avait en partie été
attribué à la réussite du lobbying anglais auprès du CIO, incarné
notamment par Sebastian Coe, ancien athlète et député conservateur, à la
tête du comité de candidature anglais.
"Si la France a perdu face
à Londres, c'est tout simplement qu'elle n'a pas fait assez pour
convaincre les 10 ou 20 membres du CIO qui ont fait basculer le vote,
explique un consultant, ayant participé à de nombreuses candidatures.
"Certes
le travail de lobbying commence des années avant le dépôt d'une
candidature mais c'est sur les 5 ou 6 derniers jours que Londres l'a
emporté", ajoute-t-il.
"Concernant le lobbying, un des points
essentiels est d'être à l'écoute des gens que nous devrons convaincre,
très en amont du projet", confirme Bernard Lapasset.
L'objectif de
Paris sera donc de disposer "avant la rentrée d'une première version du
projet technique, afin ensuite de libérer du temps pour affiner sa
stratégie à l'international", autrement dit sa stratégie de lobbying.
Il
faudra alors à Paris engager une grande campagne de séduction des 102
membres votants du CIO et de l'entourage qui les influence, "soit
environ un millier de personnes", selon le même consultant.
"Un
par un, il faut voir quelles sont les préoccupations des membres du CIO,
détaille M. Lapasset. Il faudra échanger par exemple avec un membre du
CIO président d'une fédération internationale sur la manière dont on
pourra mettre en valeur son sport à Paris."
A ce titre, les deux
membres français du CIO, Tony Estanguet et Guy Drut, "joueront un rôle
déterminant". Le projet s'appuiera aussi sur les quelques Français
exerçant des responsabilités internationales, comme Jean-Christophe
Rolland.
Quant au cadre de cette vaste campagne de lobbying, qui s'achèvera à l'été 2017 avec l'élection à Lima de la ville hôte des JO 2024, le CIO l'a réaffirmé mardi en adressant à tous les
candidats potentiels un courrier dans lequel les règles de bonne
conduite sont rappelées.
(AFP)
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