Il a d'abord réglé ses comptes avant d'endosser les habits de
rassembleur: Joseph Blatter a adopté samedi une stratégie de défense en
deux temps, au lendemain de sa réélection pour un 5e mandat à la tête de
la Fifa, ébranlée par un scandale de corruption.
. USA, Platini: Blatter règle ses comptesPremier étage de la
fusée: une interview à la RTS (télé suisse) où Blatter, 79 ans, dégaine à
tout va. Le Suisse, président depuis 1998, se dit d'abord "choqué" par
les accusations de Loretta Lynch, la ministre de la Justice des
Etats-Unis.
Celui qui est entré à la Fifa il y a 40 ans ne digère
pas le coup de filet dans un hôtel de luxe de Zurich (sept responsables
de la Fifa arrêtés) à deux jours du Congrès électif: "Il y a des signes
qui ne trompent pas: les Américains étaient candidats à la Coupe du
monde de 2022 et ils ont perdu (...). Si les Américains ont à faire avec
des délits d'argent ou de droit commun qui concernent des citoyens nord
ou sud-américains, qu'ils les arrêtent là-bas, mais pas à Zurich alors
qu'il y a un Congrès."
Et de lancer: "N'oublions pas qu'ils (les
Etats-Unis) sont le sponsor numéro un du royaume hachémite, donc de mon
adversaire (battu, le prince jordanien Ali bin Al Hussein), cette
affaire ne sent pas bon."
En tout cas, la justice américaine
n'entend pas s'arrêter là. "Je suis plutôt confiant dans le fait qu'il
va y avoir une nouvelle vague d'inculpations", a confié au New York
Times le patron de la cellule enquêtes criminelles du fisc américain,
l'IRS, Richard Weber.
Selon le journal britannique The Sunday
Times, Blatter devrait être interrogé par la justice suisse avec neuf
autres hauts responsables de la Fifa dans le cadre d'une autre enquête
pénale, celle sur l'attribution des Coupes du monde 2018 et 2022.
L'article
fait référence à une procédure ouverte il y a deux mois par le parquet
de Berne sous le nom de code "Opération Darwin", mais la source de
l'information n'a pas été précisée.
Samedi, Blatter a également
sorti les griffes contre l'UEFA dont le président Michel Platini lui
avait demandé en personne de démissionner. "On ne m'enlèvera pas de
l'idée que (ce n'est pas) une simple coïncidence cette attaque des
Américains et la réaction de l'UEFA et de M. Platini", tonne le
président réélu de la Fifa.
Interrogé sur Platini, le patron du football mondial répond: "Je pardonne à tout le monde, mais je n'oublie pas."
Concernant
les relations futures avec l'UEFA, il tempère toutefois: "Il faudra
continuer avec Platini et l'UEFA. Nous ne pouvons pas vivre sans l'UEFA
et l'UEFA ne peut pas vivre sans nous."
Franz Beckenbauer, ancien
membre du comité exécutif de la Fifa, a d'ailleurs appelé au dialogue
les deux organismes: "Ils doivent s'entretenir vite. Parce que ce qui
arrive est préjudiciable non seulement pour les fédérations mais aussi
pour le football."
. 'Pourquoi je démissionnerais ?'Quand le journaliste
souligne que, dans des grandes multinationales, le PDG démissionne
lorsque des membres du conseil d'administration sont arrêtés dans une
affaire de corruption, Blatter reste ferme.
"Pourquoi je
démissionnerais ? C'est accepter, c'est dire je suis fautif de tout ce
qui arrive, moi je lutte depuis 2011 (précédente réélection) avec nos
différentes commissions (au sein de la Fifa) contre toute corruption",
se défend cet ancien attaquant de modeste niveau.
. CE: pas de clash mais une chaise videAprès cette interview
offensive, le ton s'est voulu plus consensuel au cours d'une conférence
de presse tenue juste après le Comité exécutif. Ce dernier était chargé
de régler l'épineuse question de la répartition par continent pour les
Coupes du monde 2018 et 2022 en Russie et au Qatar.
Le clash a
été évité au CE puisque le nombre de pays qualifiés restera à 32 avec le
même quota par continent. L'Europe est soulagée et garde ses 13
qualifiés pour le Mondial-2018 plus la Russie, pays organisateur, alors
que l'UEFA avait exprimé ces derniers mois ses craintes de perdre une
place.
Concernant la semaine noire vécue par la Fifa, M. Blatter
s'est dit "affecté par les attaques" nées du scandale de corruption. Il a
toutefois appelé à "l'unité et la solidarité" et estimé qu'il restait
"l'homme de la situation".
Ce n'est pas l'avis de l'Anglais David
Gill, qui avait été choisi par l'UEFA pour occuper l'un des postes de
vice-président de la Fifa.
Gill, vice-président de la Fédération
anglaise (FA), a refusé cette fonction et a laissé son siège vide au CE.
"Les événements ravageurs de ces trois derniers jours m'ont convaincu
qu'il n'était pas approprié d'être membre du comité exécutif de la Fifa
avec la direction actuelle", s'est-il justifié.
Le président de la
FA, Greg Dyke, a d'ailleurs estimé "que M. Blatter ne sera plus là dans
quatre ans (...). On pourra élire quelqu'un qui mettra de l'ordre dans
le football mondial".
(AFP)
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