A chaque jour sa révélation dans l'immense scandale qui secoue la
Fifa: 53 cas suspects de blanchiment d'argent, dans le cadre de
relations bancaires, sont passés à la loupe par la justice suisse pour
le volet sur l'attribution des Coupes du monde 2018 (Russie) et 2022
(Qatar).
"Quelque 104 relations d'affaires bancaires sont sous
enquête, et partiellement, en sus, les banques ont signalé au bureau
anti-blanchiment quelque 53 cas suspects", a dévoilé Michael Lauber,
procureur général de la Confédération helvétique, au cours d'une
conférence de presse à Berne mercredi.
Les banques "ont fait leur
devoir" a exposé le représentant du Ministère public, ajoutant que
l'enquête -- ouverte en mars dernier, contre X, à la suite d'une plainte
de la Fifa elle-même en novembre 2014 -- sera "longue". Et de préciser
qu'il "n'exclut pas" d'auditionner le président démissionnaire de
l'instance suprême du foot, Joseph Blatter, de même que le secrétaire
général Jérôme Valcke.
La Suisse a adopté il y a quelques années
un arsenal juridique pour lutter contre le blanchiment d'argent, dont
étaient souvent accusées ses banques.
La loi anti-blanchiment en
vigueur oblige désormais les banques à signaler au MROS (Bureau de
communication en matière de blanchiment d'argent) les comptes suspectés
de servir à blanchir de l'argent. Ces cas sont ensuite examinés par le
MROS, et transmis ensuite au Ministère public de la Confédération (MPC).
- Enquête "très complexe" -
Le MPC a saisi quelque "9 terabytes de données dans l'enquête sur
l'attribution des Coupes du monde de football 2018 et 2022", a encore
indiqué le procureur général, ton posé, assis et bras croisés devant le
micro posé sur son pupitre.
"Des preuves ont été récoltées qui
concernent 104 relations bancaires. Il faut être conscient que chacune
de ces relations implique plusieurs comptes bancaires", a ajouté M.
Lauber, martelant que l'enquête est "très complexe". "Le monde du
football doit être patient; de par sa nature, cette enquête pendra plus
de temps que les fameuses 90 minutes" que dure un match de foot, a-t-il
encore insisté.
Le procureur général s'exprimait mercredi pour la
première fois en public depuis que le MPC a saisi, le mois dernier, des
données et documents de la Fifa. Interrogé si l'enquête portait aussi
sur l'attribution du Mondial à l'Afrique du Sud en 2010, M. Lauber a
refusé de répondre, invoquant le secret de l'instruction.
Il a
toutefois précisé que devant l'énormité du dossier, une "task force"
(cellule) spéciale, dédiée à cette affaire sans précédent, avait été
mise en place dans ses services.
- 1,8 M de dollars du Qatar à la CAF -
Par ailleurs, le Qatar a versé 1,8 million de dollars (1,6 M EUR)
à la Confédération africaine de football en janvier 2010 "pour pouvoir
exposer leur projet" de candidature au Mondial-2022, a déclaré le
président de la CAF Issa Hayatou dans l'hebdomadaire Jeune Afrique.
Était-ce
une manière d'acheter les voix des Africains? Réponse de M. Hayatou:
"Non. D'ailleurs, j'ai convoqué immédiatement après le comité exécutif
de la CAF pour dire que ce qui s'était passé ne nous engageait en rien.
Je n'ai donné aucune consigne, et chacun a voté en son âme et
conscience."
Voilà en tout cas une nouvelle page au roman du
"Fifagate" qui a éclaté il y a juste 3 semaines, le 27 mai dernier. Dans
ces affaires, la Fifa a confié ses intérêts au cabinet d'avocats
américain Quinn Emanuel (QE), qui emploie une avocate de haut-rang,
Jenny Durkan, a confirmé à l'AFP un porte-parole de l'instance suprême
du foot.
Cette ancienne procureure générale aurait pu se trouver
du côté de l'accusation, puisqu'elle était citée parmi les successeurs
possibles de Eric Holder à la tête du ministère américain de la Justice.
C'est finalement Loretta Lynch qui a été retenue à ce poste, et c'est
elle qui est à la pointe de l'accusation dans le volet américain de
l'affaire (distinct du suisse). C'est Mme Lynch qui avait donné un
carton rouge à certains membres ou partenaires actuels ou passés de la
Fifa, poursuivis pour avoir "corrompu les affaires du football mondial
pour servir leurs intérêts et pour s'enrichir personnellement".
(AFP)
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