Le système des transferts est-il "anticoncurrentiel, injustifié et
illégal"? C'est ce qu'estime la FIFPro, syndicat international des
joueurs de football, qui a déposé vendredi une réclamation devant la
Commission européenne pour le dénoncer formellement.
"La FIFPro a
demandé à la Commission européenne d'examiner l'argument essentiel selon
lequel le règlement de transfert empêche les clubs de se concurrencer
équitablement sur le marché pour acquérir des talents sportifs, causant
ainsi un préjudice aux intérêts des joueurs, des équipes
professionnelles qu'elles soient modestes ou moyennes, ainsi qu'à ceux
de leurs supporters", indique-t-elle dans un communiqué.
Le
président de la FIFPro Philippe Piat, également président de l'UNFP
(Union nationale des footballeurs professionnels) en France, plaide de
longue date pour une refonte du système des transferts dans le football
et souhaiterait à terme en finir avec des transferts qui "restreignent
considérablement la liberté de comportement des clubs et de circulation
des joueurs."
"La Fifa peut être vue comme une association
d'entreprises, y compris ses membres, et dans notre plainte nous avons
établi que cette association, via son règlement sur les transferts des
joueurs, crée une barrière très élevée pour les clubs qui ne font pas
partie des meilleurs, et qui ne peuvent être compétitifs vis-à-vis des
gros clubs", a expliqué Jonas Baer-Hoffman, directeur de la division
Europe de la FIFPro, lors d'une conférence de presse faisant suite au
dépôt de plainte.
La FIFPro a donc déposé sa plainte auprès de la
commissaire en charge de la Concurrence, la Danoise Margrethe Vestager.
"La Commission européenne a reçu la plainte et va l'étudier", a déclaré
son porte-parole Ricardo Cardoso.
La FIFPro entend dénoncer ainsi
la non-réciprocité des droits des employés, les joueurs, et des
employeurs, les clubs, notamment sur la rupture unilatérale des
contrats. Elle reproche en fait à la Fifa, qui établit les règles du
football mondial via son règlement sur le statut et le transfert de
joueurs, de ne pas respecter un compromis datant de mars 2001, passé
avec la Commission européenne.
Ce dernier permet théoriquement aux
joueurs de rompre leur contrat unilatéralement, moyennant une indemnité
de rupture, et de changer ainsi de club au bout d'une "période de
stabilité" de trois ans après leur arrivée - ce délai pour éviter aux
clubs le risque de perdre trop de joueurs trop régulièrement.
"Le
principe de stabilité devait mettre un terme aux ententes entre clubs
sur le principe et les modalités de versements des indemnités",
expliquait déjà Piat dans le magazine de l'UNFP en 2013. Et donc aux
indemnités de transferts pharaoniques et "démesurées" - l'expression est
de Didier Deschamps, le sélectionneur français.
En fait, ce
principe s'applique très rarement: le premier cas officiel se pose en
2004, avec Philippe Mexès qui, après huit années passées à l'AJ Auxerre,
veut rompre son contrat pour s'engager avec l'AC Milan. Appelée à
trancher sur le cas du défenseur international français, la Fifa a jugé
qu'il fallait prendre en compte le dernier contrat signé par le joueur
pour calculer la durée de la "période de stabilité", et non son premier
contrat professionnel au club.
Et comme les prolongations de
contrat sont courantes dans le football, non seulement pour "sécuriser"
le joueur mais aussi pour faire gonfler la valeur de son transfert, et
que celui-ci la refuse rarement puisqu'elle est généralement assortie
d'une revalorisation salariale, les départs unilatéraux de joueurs ne
sont pas légions.
Au sein du syndicat, on espère que la Commission européenne, auparavant "très frileuse à faire la guerre à la Fifa (fédération internationale)", sera plus encline à s'y attaquer après le retentissant scandale concernant l'instance mondiale.
(AFP)
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