jeudi 12 novembre 2015

Les panneaux d'affichage géants autorisés aux abords des stades

La disposition était passée un peu inaperçue, et pour cause : c'est à l'article 223 de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques, dite "loi Macron", que s'est glissée une mesure dérogeant au droit commun en matière d'affichage public.
Cet article dispose que "les dispositifs publicitaires, lumineux ou non, implantés sur l'emprise des équipements sportifs ayant une capacité d'accueil d'au moins 15.000 places assises peuvent déroger au premier alinéa de l'article L.581-9 en matière d'emplacement, de surface et de hauteur […]." En clair, il s'agit d'autoriser des panneaux d'affichage géants – jusqu'à 50 m2 pour la publicité numérique, au-delà pour l'affichage classique – là où seules les affiches d'une surface maximum de 12 m2 (le fameux 4 x 3) étaient jusqu'alors autorisées.

Financer les investissements de l'Euro 2016

A l'origine, ce texte visait uniquement les stades de plus de 30.000 places et par conséquent quasi exclusivement ceux prévus pour accueillir l'Euro 2016 de football puisque le cahier des charges de l'UEFA impose un tel niveau de capacité minimal. L'étude d'impact justifie la dérogation à une loi protégeant les paysages par le fait que "les grands stades de l'Euro 2016 sont des équipements très spécifiques par leur taille imposante. [Et que] les dispositifs publicitaires autorisés par la réglementation, de 8 et 12 m², ne sont pas visibles dans ces espaces". Et l'étude d'impact de poursuivre : "Ces nouvelles publicités contribueront au financement des investissements auxquels les grands stades sont en train de procéder pour satisfaire aux exigences des cahiers des charges de l'Euro 2016."
En termes de revenus possibles pour les collectivités concernées, il est fait référence dans l'étude d'impact à la publicité sur les bâches d'échafaudage des monuments historiques pour lesquels "les chiffres de 20.000 à 120.000 euros par mois sont cités comme source de revenu complémentaire pour les monuments [y] ayant eu recours". Au-delà des collectivités visées par la mesure, le secteur de l'affichage publicitaire est également cité par l'étude d'impact comme bénéficiaire potentiel de la loi : "Cette mesure présente également un intérêt pour les entreprises de communication pour lesquelles elle constitue un levier de croissance dans une période où leur activité est en baisse (-1,7% en 2013 et -1,7% en 2012)."
La mesure a suscité de nombreux amendements, venus de tous les bords politiques. Les uns dénonçant des "enseignes publicitaires géantes [qui] défigurent les œuvres architecturales que constituent les grands stades et incitent à la société de consommation". Les autres fustigeant le sport "devenu une place financière où sévissent les spéculateurs de la grande finance". Tous regrettant une disposition "contribuant à renforcer le poids des annonceurs sur le sport professionnel". Ces amendements ont tous été écartés. Tout comme a été ignoré celui tendant à autoriser la vente de bière légère (moins de 3° d'alcool) dans les stades et enceintes sportives lors de manifestations sportives nationales professionnelles ou internationales, actuellement interdite par la loi Evin.

Des villes moyennes incluses dans le dispositif

La seule modification retenue a été celle visant à abaisser de 30.000 à 15.000 places assises la capacité des stades concernés par le texte. Pour les défenseurs de cet amendement, l'abaissement du seuil donnera "plus d'ampleur à l'objectif de renforcement des capacités d'exploitation économique des principaux stades français". Au lieu de douze stades, ce sont en effet près de cinquante enceintes qui seront finalement éligibles au dispositif. Parmi celles-ci, de nombreux stades de Ligue 2 de football ou de Top 14 de rugby situés dans des villes moyennes – Bayonne, Châteauroux, Dax, La Rochelle, Lorient, Mont-de-Marsan, Tarbes, Troyes, etc. –, soit autant de collectivités locales propriétaires des stades qui voient actuellement "les charges afférentes à l'entretien et l'animation de tels équipements sportifs représenter une charge directe ou indirecte importante pour leurs finances, notamment eu égard à leur population".
L'article 223 de la loi Macron prévoit enfin que l'implantation de ces dispositifs dérogatoires "est soumise à l'autorisation du conseil municipal ou de l'assemblée délibérante de l'établissement public de coopération intercommunale compétent ou du conseil de la métropole de Lyon". Etant donné que les mairies ou intercommunalités sont propriétaires de la quasi-totalité des équipements concernés, cette dernière disposition peut apparaître de pure forme. Les conditions de mise en oeuvre de cette disposition seront fixées par décret en Conseil d'Etat.

(Localtis)

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Journaliste spécialisé dans l'actualité sportive, j'ai collaboré, entre autres, à So Foot, Libération, Radio France Internationale. Aujourd'hui, je suis particulièrement les politiques sportives au plan national et dans les collectivités locales pour Localtis.