Le Qatar a annoncé mardi une série de mesures pour protéger les
milliers de travailleurs étrangers employés sur des chantiers liés à la
Coupe du monde de football en 2022.
Le richissime émirat gazier du
Golfe, vivement critiqué par les organisations de défense des droits de
l'Homme pour les conditions de travail et de vie des employés, en
particulier dans le secteur du bâtiment, a invité l'Organisation
internationale du Travail (OIT) à vérifier l'application de sa
législation.
Le comité d'organisation du Mondial-2022, récemment
renommé "Comité suprême pour les projets et l'héritage au Qatar", a
annoncé "des normes pour le bien-être des travailleurs". Ces textes
exigent que les entrepreneurs versent les salaires sur des comptes
bancaires et prévoient un système permettant de "vérifier que tous les
travailleurs sont bien payés et à temps".
Le document prévoit
aussi "des normes pour le logement des travailleurs, fixant des bases
claires concernant le nombre de lits par chambre et assurant un seuil
minimum en matière de propreté et d'hygiène".
En novembre, Amnesty International avait dénoncé une exploitation
"alarmante" des travailleurs immigrés au Qatar, citant des cas où des
ouvriers, majoritairement asiatiques, étaient traités d'"animaux". Le
quotidien britannique The Guardian avait même fait part de la mort de 44
ouvriers entre juin et août 2013 sur les chantiers du Mondial.
Doha
précise avoir appelé l'OIT à suivre "tout le processus allant du
recrutement aux conditions de vie et de travail" des immigrés employés
sur ces chantiers.
Mais la Confédération syndicale internationale (Ituc) a immédiatement exprimé ses plus
grandes réserves, affirmant que ses initiatives ne visaient qu'à
"renforcer le système controversé du kafala", système en vigueur dans
les pays du Golfe et par lequel chaque salarié est en fait la
quasi-propriété de son "sponsor", son "Kafil".
"La promesse de
garantir la liberté de mouvement est une mascarade dès lors que le Qatar
applique une ségrégation des ouvriers sur une base raciale", a estimé
Sharan Burrow, secrétaire générale de l'Ituc. "Si la Fifa (fédération internationale de football) est sérieuse quant à l'organisation de la
Coupe du monde 2022 par le Qatar, elle doit demander la liberté
d'association afin que les ouvriers puissent être représentés par la
personne de leur choix".
Dans une première réaction mardi, Amnesty
International a vu dans les mesures annoncées à Doha "un effort
positif, même partiel, pour prévenir certains des pires abus" commis sur
les chantiers du Mondial.
Mais cela "ne répond qu'aux
préoccupations d'une proportion relativement faible des migrants au
Qatar, ceux impliqués dans la construction des stades et des terrains
d'entraînement", a ajouté James Lynch, chercheur d'Amnesty sur les
droits des migrants dans le Golfe.
"Les normes ne s'appliquent pas
aux milliers d'autres travailleurs migrants au Qatar, y compris ceux
qui vont construire les infrastructures de soutien à l'organisation du
Mondial, dont les routes, les hôtels et les chemins de fer", ajoute
Amnesty, qui exige une "véritable réforme, incluant le système de
parrainage (kafala)" pour l'ensemble des travailleurs dans le pays.
Fin
janvier, la Fifa avait "sommé" l'émirat de présenter au plus tard le 12
février des mesures concrètes pour améliorer le sort des ouvriers.
Au
Parlement européen à Bruxelles, les eurodéputés avaient de leur côté
adopté une résolution en novembre dans laquelle ils se disaient
"préoccupés" par leurs conditions et par une possible augmentation de la
mortalité sur les chantiers du Mondial. Une audience est prévue jeudi
sur la question devant une commission du parlement.
En octobre,
une délégation syndicale internationale avait elle aussi jugé la
situation des travailleurs étrangers au Qatar "inacceptable".
(AFP)
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