mercredi 3 février 2016

Patrick Wolff quitte la LNR et prône la décroissance pour le rugby

Membre historique de la Ligue nationale de rugby et ancien dirigeant de l'AS Montferrand, Patrick Wolff, a envoyé, ce jeudi soir, au président de la LNR, Paul Goze, sa démission ; un courrier accompagné d'une longue lettre expliquant sa décision.
Dirigeant de l'AS Montferrand du début des années 90 jusqu'en 2002, cet Auvergnat et ancien skieur de très bon niveau a participé à la création de la Ligue nationale en 1999, au côté de Serge Blanco. Il avait posé sa candidature à la présidence de la Ligue en 2012 (pour succéder à Pierre-Yves Revol), avant de la retirer le matin de l'élection. Homme de l'ombre et de dossiers, Patrick Wolff a énormément oeuvré sur plusieurs grands chantiers du rugby professionnel depuis plus de quinze ans. 
Il fut notamment l'un des artisans du retour des clubs anglais en Coupe d'Europe en 2000. Il a également participé activement à toutes le conventions entre la Ligue et la Fédération française de rugby. Son communiqué est suffisamment explicite pour deviner les raisons de cette démission. C'est un doux euphémisme de dire que Patrick Wolff n'était plus en phase avec l'orientation prise par le rugby professionnel français, notamment ses dérives économiques et ce que cela engendre.
« J’ai pris la décision de mettre un terme à mes fonctions au sein de la ligue nationale de rugby. Humainement, géographiquement et historiquement le seul sport de combat collectif est une formidable aventure à laquelle j’ai eu le bonheur de prendre part. Privilégier cette aventure humaine, ce n’est pas refuser le professionnalisme si on s’en tient à sa définition : rechercher l’excellence en permanence. En privilégiant, dans une urgence qui n’existait pas, une course au développement économique à coups d’injection massive d’argent nous nous sommes piégés.
La poursuite sur la durée, de cette stratégie a pour effet de négliger de plus en plus nos responsabilités vis-à-vis de notre environnement sportif notamment des jeunes, des acteurs du jeu et de l’équipe  de France. L’effet de mode une fois passé, cette stratégie ne mène nulle part. D’ores et déjà elle impacte notre image en confinant notre communication à des promotions d’égos et à des buzz puérils au détriment de la seule chose qui compte : ce qui se passe sur le terrain.
Elle affaiblit la notion même de compétition, en Europe comme en France, en tuant à petit feu les équipes moins pourvues financièrement et en alignant les résultats sportifs sur les budgets…
Elle met en danger de mort la chaine qui va des poussins à l’équipe de France.
Dans ce contexte :
-  Je ne supporte plus les lancinantes jérémiades des autos proclamées têtes de gondole de notre championnat, assorties de menaces régulières de toutes sortes au gré des humeurs ou des rencontres.
-  Je ne supporte plus de voir quotidiennement dans les médias la litanie des joueurs qui arriveront en 2016/2017 avant même que les championnats 2015/2016 n’aient débuté ou que les joueurs ne soient arrivés dans leurs clubs.
-  Je ne supporte plus de voir perdurer un empilement de compétitions fait d’impasses et de doublons dans un calendrier saucissonné dans lequel il est impossible de savoir si l’on va voir l’équipe 1 2 ou parfois 3 sur le terrain.
-  Je ne supporte plus de voir une Coupe du monde magnifique gâchée pour nous, parce que les étrangers cantonnent sur le banc trop de français et que le dire et penser qu’il faut que cela change est très mal vu.
-  Je ne supporte plus de ne pas profiter au printemps des chœurs du Munster ou du Leinster ou du Cardiff, parce que le système mis en place par les anglais avec notre accord passif ne leur permet plus d’aligner des équipes compétitives. Plus d’argent chez les uns et autant d’argent chez les autres, on appelle aussi cela s’appauvrir.
Ce modèle factice ne me semble pas durable mais il est désormais clair qu’il s’est installé sur la durée, d’autant que je ne sens pas une réelle volonté politique de le remettre en cause.
Lorsqu’il n’adhère plus à une politique, un ministre doit se retirer.
Je souhaite que Guy NOVES ait le temps de réussir, que le rugby professionnel survive sur ses terres de culture et que Brive ou La Rochelle soient un jour champion de France et bien sûr  avec un clin d’œil, que mon club de cœur puisse connaitre de grands bonheurs ».
 
(La Montagne)

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Journaliste spécialisé dans l'actualité sportive, j'ai collaboré, entre autres, à So Foot, Libération, Radio France Internationale. Aujourd'hui, je suis particulièrement les politiques sportives au plan national et dans les collectivités locales pour Localtis.