Issa Hayatou, patron du foot africain depuis 1988 et désigné jeudi
président par intérim de la Fifa après la suspension de 90 jours de
Joseph Blatter, c'est l'homme de la première Coupe du monde en Afrique
(2010), mais aussi une image trouble.
Le Camerounais de 69 ans a
longtemps rêvé de diriger la Fifa, le voilà exaucé. Mais dans des
conditions chaotiques au sein de l'instance et alors qu'il fait face
depuis plusieurs années à des ennuis de santé.
Selon les statuts
de la Fifa, Hayatou assure l'intérim car il est le "plus ancien
vice-président du Comité exécutif en poste". Il est aussi président de
la commission des finances de la Fifa.
"J'occuperai
cette fonction uniquement à titre intérimaire. Le Congrès
extraordinaire choisira le 26 février 2016 un nouveau président et je ne
serai moi-même pas candidat à cette élection", a insisté Hayatou.
Cet
ancien professeur de sport, adepte de la course de demi-fond et du
basket dans sa jeunesse, est passé par la Fédération camerounaise
(Fecafoot) dans les années 1980, avant de s'emparer de la CAF en 1988 et
d'entrer au comité exécutif de la Fifa en 1990.
Avec Blatter, élu
président de la Fifa en 1998, ils vont d'abord s'affronter à l'élection
de 2002. Le Suisse bat aisément le Camerounais. Ils se sont jaugés, ils
vont désormais s'allier de manière indéfectible.
- "Blâme -
La Fifa développe les infrastructures du foot africain à travers
le projet Goal, donne à l'Afrique sa première Coupe du monde (Afrique du
Sud en 2010) et porte de quatre à cinq le nombre de pays africains pour
le tournoi suprême.
En échange, Blatter a le soutien
inconditionnel des 54 membres de la CAF, la confédération qui en compte
le plus, soutien réaffirmé au plus fort de la tourmente du scandale
planétaire.
Hayatou a aussi développé la Coupe d'Afrique des
nations (CAN). Le 15 juin dernier, la CAF annonçait le renouvellement de
son contrat avec Sportfive et la garantie de toucher au moins un
milliard de dollars sur les douze prochaines années.
Mais Hayatou,
c'est aussi un parcours parsemé d'affaires, certaines relatées sans
preuve chez les journalistes africains, d'autres mises sur la place
publique, créant un halo de suspicions.
En décembre 2011 par
exemple, le Comité international olympique (CIO), dont il fait partie,
lui inflige un "blâme" qui a valeur de "sanction", selon son président
Jacques Rogge, dans l'affaire de pots-de-vin ISL, partenaire commercial
de la Fifa dans les années 1990.
- "Dialyse" -
Le Camerounais avait reconnu avoir perçu personnellement 100.000
francs français (15.244 euros) en liquide d'ISL pour, selon lui, financer les festivités du 40e anniversaire de la CAF en 1995. Conflit d'intérêt, a estimé la commission d'éthique du CIO.
En
juin dernier, Hayatou a reconnu dans le magazine Jeune Afrique un
versement d'"1,8 million de dollars" à la CAF par les Qataris "pour
pouvoir exposer leur projet (de candidature à la Coupe du monde 2022)
lors du congrès" de Luanda en janvier 2010, en marge de la CAN.
Autre
fait saillant, sa gestion particulière de la fusillade du bus du Togo à
Cabinda, à l'orée de la CAN-2010 en Angola, où deux membres du staff
togolais avaient perdu la vie. Le pays décide de rapatrier l'équipe. Du
coup, la CAF la suspend pour "ingérence gouvernementale"...
Et
quand des journalistes européens s'émeuvent de la clémence des sanctions
après des violences dans une demi-finale de la CAN-2015 en Guinée
équatoriale, il leur renvoie leur "néocolonialisme".
"On suspend
le président de la Fifa, on suspend le président de l'UEFA (Michel
Platini). N'importe qui qui +déconnera+ sera suspendu", a-t-il prévenu
dans un entretien accordé à RFI après sa nomination, avant d'y couper
court à l'antenne, avouant devoir avoir recours à "une dialyse",
traitement pour pallier à une insuffisance rénale. Les semaines et mois
qui suivent ne seront pas de tout repos pour Hayatou.
(AFP)
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