vendredi 2 octobre 2015

Sport : un budget aux forts accents "sociaux"

En début d'année, nous écrivions : "En 2015, les politiques sportives seront marquées par la candidature de Paris aux JO... ou pas" (lire ci-contre notre article du 27 janvier 2015). Dix mois plus tard, nous y voilà. La candidature de Paris aux Jeux olympiques est officielle et permet aujourd'hui au ministre des Sports Patrick Kanner et à son secrétaire d'Etat Thierry Braillard d'afficher une proposition de budget pour 2016 en hausse. Mais cette "hausse" a des allures de victoire à la Pyrrhus pour le sport pour tous et partout.
Le budget des Sports se décompose dans le projet de loi de finances (PLF) 2016 comme à son habitude en deux grandes enveloppes : les crédits du programme Sport, d'un côté, ceux du CNDS (Centre national pour le développement du sport), de l'autre. Globalement, le budget 2016 sera de 497 millions, contre 494 en 2015, soit +0,6%. Dans le détail, le programme Sport affiche une hausse de 3,9%, passant de 224 à 233 millions d'euros. Parallèlement, les crédits du CNDS seront en baisse pour la quatrième année consécutive, passant de 270 à 264 millions d'euros (-2%).

Nouvelle baisse de crédits pour le CNDS

Financé par les recettes de la Française des jeux (FDJ), le CNDS aurait pu, dans le meilleur des mondes possibles, voir ses crédits augmenter. La FDJ avait en effet annoncé en début d'année une hausse de ses ventes 2014 de +5,2%. Mais le gouvernement en a décidé autrement. Enfin, pas tout à fait… Car à ce stade, il est prévu que les 10 millions d'euros versés via le CNDS pour soutenir la candidature de Paris aux JO 2024 (lire ci-contre notre article du 23 juin 2015) proviennent d'un prélèvement exceptionnel sur la FDJ, selon un modèle déjà retenu pour financer les aides de l'Etat aux stades de l'Euro 2016.
Quant à la répartition des crédits "traditionnels" du CNDS, elle reste encore en suspens. Si l'année dernière, le PLF mentionnait explicitement l'enveloppe allouée à la part territoriale (subventions aux associations sportives locales), le document est muet sur le sujet cette année. Interrogé par Localtis, Thierry Braillard a renvoyé cette décision au conseil d'administration du CNDS du 1er décembre. Selon nos informations, il devrait être proposé une baisse de la part territoriale de 132 à 124 millions d'euros. Les crédits du centre comprendraient en outre 3,5 millions pour les grands événements sportifs. Enfin, la part réservée aux équipements serait de 35 millions d'euros : 10 millions pour des équipements d'envergure nationale et 25 millions pour des équipements locaux "structurants"… à condition qu'ils se trouvent en territoires carencés. Il faut voir dans cette fonte spectaculaire des moyens alloués par l'Etat aux équipements sportifs (l'enveloppe générale s'élevait à 68 millions en 2011 et encore à 48 millions en 2014), la triple action du plan de rigueur entamé en 2013 "suite au constat d'une situation d'endettement critique" du centre, du rapport de 2014 sur le manque d'effet de levier des aides du CNDS, et de la constance affichée par le gouvernement, y compris sous la majorité précédente, d'écarter les projets dans les territoires non prioritaires.

Les quartiers prioritaires et le sport de haut niveau chouchoutés

Si le CNDS et, à travers lui, les clubs et les équipements pour tous et partout sont les perdants de ce budget "en hausse", qui en sont les gagnants ? Tout d'abord l'emploi sportif dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Dans le cadre du plan "Citoyens du sport", 100 emplois supplémentaires d'éducatrices et éducateurs sportifs seront créés en 2016 au sein des clubs actifs auprès de la population dans les QPV grâce à une aide du CNDS de 18.000 euros par an et par emploi, soit 6,5 millions d'euros. Une mesure qui s'ajoute aux 1.000 emplois CNDS d'éducateurs sportifs à créer de 2015 à 2017 dans les QPV. Toujours au chapitre emploi, 2,8 millions d'euros seront consacrés en 2016 à former 1.500 jeunes en insertion aux métiers du sport et de l'animation à travers le dispositif Sésame.
Autre grand gagnant : le sport de haut niveau. Le budget prévoit d'abord une nouveauté : le financement à hauteur de 1,83 million d'euros de la couverture des accidents du travail et des maladies professionnelles de 5.600 sportifs de haut niveau. Et bien entendu, année olympique oblige, il est prévu 5 millions d'euros de primes pour les futurs médaillés olympiques de Rio.
A noter encore que les conventions d'objectifs signées entre le ministère des Sports et les fédérations sportives prévoient que 6,5% du montant des subventions sont exclusivement dédiés aux pratiques féminines, soit plus de 5,6 millions d'euros. En outre, au niveau territorial, les subventions allouées par le CNDS permettant de soutenir les projets des associations locales et des fédérations pour le développement de la pratique féminine seront abondées de un million d'euros. Enfin, le dispositif "J'apprends à nager", destiné aux enfants de 6 à 12 ans qui ne savent pas nager et résident prioritairement dans les zones carencées, sera l'an prochain doté de 1,5 million d'euros, contre 1 million en 2015.
En conclusion, le budget des sports 2016 fait la part belle aux sportifs de haut niveau et aux grands événements sportifs. Quant au sport pour tous, il paraît de plus en plus fractionné entre, d'un côté, des territoires et des publics prioritaires qui captent les subventions, notamment les aides à l'emploi, et de l'autre, des territoires et des publics non prioritaires dont les moyens, tant en faveur des associations que des équipements, se réduisent d'année en année. Autrement dit, le budget des Sports ressemble de plus en plus à un budget d'appui des politiques sociales.

(Localtis)

1 commentaire:

  1. En quoi le soutien au sport de haut niveau est il un appui aux politiques sociales ? Cela ressemble plus à de la communication. Pour ce qui est de la création d'emplois d'éducateurs sportifs dans les quartiers prioritaires, au delà de l'intérêt réel de ces emplois c'est la question de leur pérennité et du financement du secteur associatif trop dépendant des subventions.

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Journaliste spécialisé dans l'actualité sportive, j'ai collaboré, entre autres, à So Foot, Libération, Radio France Internationale. Aujourd'hui, je suis particulièrement les politiques sportives au plan national et dans les collectivités locales pour Localtis.