Thierry Braillard, secrétaire d'Etat aux
Sports, a lancé mercredi 7 octobre les travaux de la Grande Conférence
sur le sport professionnel français. Parmi les 48 membres des 6
commissions thématiques, on ne trouve qu'un seul élu local. Patrick
Appéré, adjoint au maire de Brest chargé des sports et coprésident de la
commission sport professionnel de l'Andes (Association nationale des
élus en charge du sport), siégera dans le groupe appelé à plancher sur
l'exploitation des enceintes sportives. Pour Localtis, il précise les
positions qu'il sera amené à défendre tout au long de travaux qui
dureront jusqu'en mars 2016 et devraient déboucher sur des propositions
de textes législatifs ou réglementaires.
Localtis : Tout d'abord, que pensez-vous de la représentation des élus territoriaux dans cette conférence ?
Patrick Appéré : On est encore trop dans un
grand face-à-face entre l'Etat et le mouvement sportif. On ne donne pas
la place qui leur revient aux collectivités, qui sont à la fois celles
qui font vivre le sport sur les territoires et celles qui financent les
équipements. La présence d'un seul représentant des élus, à travers
l'Andes, ce n'est pas suffisant. Il aurait fallu qu'on soit bien plus, y
compris sur d'autres commissions, qu'on puisse donner notre avis. Nous
élus du sport, nous passons notre temps sur les stades, dans les clubs,
tous les week-ends. Nous sommes peut-être les plus pragmatiques des
élus. Nous avons donc une vision intelligente sur un certain nombre de
sujets et notre parole n'est pas assez présente au sein de cette grande
conférence.
Que vous inspire la thématique des enceintes dédiées
au sport professionnel et tous les sports sont-ils concernés au même
chef ?
Pour l'Andes, il y a un enjeu fort sur ces questions. Nous avons déjà
engagé un travail sur cette question afin que la transparence l'emporte
quand nous sommes en discussion sur la location de nos équipements
sportifs en direction du monde professionnel. Ces dernières années, il y
a eu toute une série de rapports qui n'ont pas produit d'effets. Le
football et le rugby ont des moyens importants, notamment à travers les
droits télé, et donnent lieu à une réflexion particulière. Alors que le
basket, le handball, le volley-ball et le hockey sur glace sont beaucoup
plus dépendants de l'argent public. On ne peut pas travailler avec les
mêmes éléments d'analyse pour tous les sports.
Comment peut-on parvenir à une règle commune pour fixer des redevances au juste prix ?
D'après une étude de l'Andes sur la redevance, on voit que chacun
fait ce qu'il veut. Il faut mettre de l'ordre. Nos citoyens réclament de
plus en plus de la transparence sur la question de l'argent public. il
faut construire cette transparence à travers des indicateurs et des
méthodologies de calcul clairs. Pour autant, fixer une redevance, c'est
compliqué. A Brest, nous avons une histoire avec le club, et le club a
une histoire avec la ville, ses habitants et pas seulement les élus.
Quand un club a des difficultés financières ou un budget serré, c'est
très compliqué de faire du juste prix. On doit donc avancer
tranquillement, de manière transparente, sans que le rapport de force ne
l'emporte. Avec les derniers agrandissements de stades, on voit que la
redevance n'augmente que faiblement au regard de ce qui a été réalisé.
Ce sont des négociations compliquées, alors que les finances du sport
professionnel sont un trou sans fond. Dès qu'un club a plus d'argent, il
y a une culture du toujours plus de salaire, toujours plus de grands
joueurs. Le centre de formation et les équipements ne viennent qu'après.
On doit se demander s'il ne faut pas obliger les clubs à investir dans
les équipements en ponctionnant une part des droits télé. Nous sommes
favorables à cette solution.
Les partenariats public-privé (PPP) qui ont fleuri dans le football depuis 2011 sont-ils une solution ?
Dans un premier temps, l'argent public se faisant rare, les PPP
paraissaient être de bons outils. Que les clubs puissent être
propriétaires de leurs stades et avoir de l'immobilier dans leurs
actifs, pourquoi pas ? Sauf que derrière, ceux qui sont à la tête des
PPP sont souvent les constructeurs, et plusieurs villes n'ont pas vu que
dans ces affaires, c'étaient elles qui étaient bernées. Dans la forme
qu'ont pris les PPP aujourd'hui, le public gère les difficultés et le
privé gère les bons résultats. Ça n'est pas possible comme ça. Pour les
collectivités qui en ont mis en place, ce n'est pas seulement décevant
mais ruineux. Il faut complètement repenser les PPP.
L'investissement des clubs dans leurs stades pourrait-il passer par le bail emphytéotique administratif (BEA) ?
Le BEA fait partie des choses dont il faut débattre. Il faut aussi y
aller crescendo. Si vous regardez un stade de football, la pelouse est
bien l'outil de travail des joueurs, de même que ce qui concerne
l'accueil des joueurs ou les vestiaires peut être considéré comme de la
responsabilité du club. Ce qu'il y a autour, avec la notion de sécurité,
l'accueil des spectateurs, on peut admettre que ce soit de la
responsabilité de la ville.
Finalement, peut-on encore parler de service public à propos d'une enceinte servant au sport professionnel ?
En construisant une belle salle confortable comme nous l'avons fait à
Brest, nous amenons des gens vers le sport ou vers la culture, alors
que sans cela, ils seraient peut-être restés devant leur télévision.
Cela fait partie des missions de service public. Mais dès qu'on est sur
de la Ligue 1 ou de la Ligue 2, on ne trouve que du football dans ces
stades. Si les clubs rachetaient leurs stades, on pourrait mettre dans
des équipements de sport pour tous ce qu'on met dans les stades du
football professionnel. Mais aujourd'hui, peu de clubs ont les moyens de
devenir propriétaires de leur stade. Il ne faut pas se raconter
d'histoires. Et à partir de cette réalité, il faut permettre aux clubs
de s'approprier certains éléments immobiliers petit à petit.(Localtis)
Il serait temps.
RépondreSupprimerLa situation est particulière: les collectivités financent et entretiennent les équipements, les fédérations imposent les normes, les clubs utilisent et réclament les améliorations.
Les fédérations devraient gérer certains équipements... ça limiterait leurs modifications de normes sportives.